Freud/Galilée (1) par Paul Mathis
FREUD, GALILEE
vers d’autres références éthiques
vers d’autres références éthiques
En contraste peut-être avec les exposés précédents, je vous inviterai à sortir de notre région pour un voyage vers l’Italie, vers l’Allemagne, et faire peut-être un tour en ballon, afin de gagner Jupiter, et laisser tranquille le royaume des morts qui ne nous laisse du vivant que la beauté incertaine d'Abou-Simbel.
Au-delà de la dispersion et des conflits, je tenterai d'envisager l’unité possible du sujet face à l’incohérence du monde instaurée par l’homme, malgré l’exhibition d'une culture et d'un politique d'apparat.
Freud nous a-t-il donné une clef parente à celle de Galilée ? Dans ces deux cas, ces hommes ont développé l’intellect du sujet, en correspondance avec le réel du monde, en opposition aux fantasmes et à la folie du collectif, pour notre liberté, et peut-être aussi pour notre bonheur.
Deux autres personnages, un peu plus anciens, amis et porteurs d'un désir éminent de clarté, Erasme et Thomas More méritent un souvenir. Ils avaient tenté d'interroger la confusion de l’homme dans son rapport au monde, en n'apportant toutefois qu'une bonne volonté, malgré l’acuité de leurs intelligences, car telles étaient maintenues l’indigence et la brutalité du politique environnant. Et l’un de ces hommes de paix y a laissé sa tête, sur le billot de la Tour de Londres.
Freud et Galilée, peut-être à partir de l’apport d'une aide scientifique moderne ont introduit une connotation nouvelle, celle du corps vivant face aux jouissances mortifères qui jusqu'à présent restent importantes.
Le problème moderne fondamental, dans sa tentative de résolution a été probablement posé par ces deux hommes, Galilée et Freud. Le premier nous a ouvert l’univers cosmique, le second nous a permis de nous approcher de la destinée du corps. Allié au premier celui-ci a rendu possible l’intelligence de l’homme face au monde gigantesque dans la ligne du droit de vivre et nous permettre d'effacer le drame de souffrance dont nous avons hérité, vers une vie clairvoyante et peut-être heureuse, intellectuellement et affectivement.
Evoquer Freud face à Galilée, c'est poser la prévalence de l’intellect, entre le monde physique et l’angoisse de l’humain enfermé dans le discours religieux dont le grand prêtre de l’époque, a fait incarcérer Galilée dans les prisons du Saint-Office.
Quel est le désir du sujet ? Est-il essentiellement d’obéissance au désir de Dieu ou à ses dérives politiques ? Soumission aux rites qui tentent de jeter un pont entre les fantasmes et le désir tourmenté du sujet pour le pouvoir du Grand Autre dont on réclame la décoration ?
Ce qui est singulier, c'est l’émergence d'un homme, franchissant les remparts judaïques pour oser formuler le désir du sujet, en corrélation au génie de Galilée.
Peut-on déceler dans l’œuvre d'art, dans la démarche scientifique, dans la trajectoire de l’histoire, dans le protocole analytique, en référence à la vie du corps, des éléments permettant de se dégager du désastre afin de concevoir un horizon où l’ordre de la concorde, de l’harmonie serait une référence prévalente ?
Cependant Freud n'a posé que partiellement l’instance de la différence sexuelle dans le réel du corps. Celui-ci reste-t-il tributaire des impostures religieuses et mythiques, bâties par les pouvoirs de mort ? Mais si une telle difficulté reste à l’affût, demeurent ce que l’art et la science peuvent apporter de processus complémentaires, même s'il faut attendre de savoir mieux apprécier le message de l’enfant, afin que celui-ci ne soit plus immolé.
Brecht évoquant Galilée nous propose un grand espoir. “Une nouvelle ère s'entrouvre, écrit-il, une ère splendide où il fera bon vivre (1)”. Une ère où Freud a évoqué, sans la résoudre l’importance de la différence sexuelle.
Quel est le rapport entre la séduction, l’apparat, le pouvoir et la vie de tout sujet sexué? Comment l’acte sexuel se glisse-t-il entre la vie et la mort ? C'est ceci que Freud pose à la base de sa démarche rejoignant Galilée situant le sujet dans l’univers cosmique abordable par le seul intellect.
Nous n'avons reçu de notre héritage culturel, malgré certains aspects heureux qu'une prévalence donnée au désastre appliqué, dès la naissance à l’enfant nouveau-né, qui nous offre la vie et d'infinies re-créations. Mais l’adulte veut maintenir la mort qui assure son pouvoir et la souffrance comme style de jouissance dans la référence au Grand Autre, par obéissance à la loi.
II n'y a qu'une référence fondamentale, celles des actes du corps dans la différence sexuelle, signant échos et résonances d'un corps à l’autre. Différence bâtie non sur le phallus d'un côté et son absence de l’autre, mais sur le phallus d'un côté et l’utérus de l’autre.
La castration est un fantasme au service du pouvoir, dans la maintenance des archaïsmes.
Le phallus d'un côté et l’utérus de l’autre créent conjointement la vie. Le sperme s'écoule vers l’utérus et non vers le rectum et l’enfant à son terme aboutit à la vie aérienne. Le fantasme ne peut avoir de pouvoir pour le maintenir in-utéro, indéfiniment phallus manquant à la mère et à la femme jalouses.
Car ce phallus fantasmatique devient l’épée, le fusil, le canon, au lieu d'écrire dans le réel, entre les lèvres de la femme, la langue de l’un et de l’autre affinant cette rencontre dans les caresses et dans les mots.
Certes ce phallus s'évade dans des représentations parfois anecdotiques et prétentieuses. II devient une plume, un crayon, une baguette, un archet, deux ou trois doigts, pour castrer le corps masculin répondant au corps de la femme. Ces deux corps différents énoncent dans les lignes, les couleurs et les sons, paramètres de nos rapports au monde, les correspondances, les accords, les conjonctions, de ce qui peut devenir les matériaux les plus élogieux de la vie où la différence sexuelle est le soubassement à l’épanouissement, dont les sourires et les caresses signeront la vérité et ceci dès la perspective du désir d'enfant.
Pour que la personne soit sujet sexué, et non esclave, non porteuse de symptômes, le corps doit toujours être énonciateur, traducteur, acteur libre au noeud de la différence sexuelle sans agression.
L'absolu du corps est la tendresse, l’attention, l’intellect incarné. Ce qui constitue le vivant, dont l’enfant est l’essentiel représentant, opérateur des inventivités et des étonnements.
L'analyste, référence instaurée par Freud, est à une place difficile, mais impossible à ne pas tenir, entre le sujet et le Grand Autre ; rapport qui est presque toujours conflictuel, mais d'où peut émerger une structure d’espoir apparentée à la cohérence des signifiants.
N'est-ce pas la femme, en tant que mère, qui récupère en tant que castratrice, un pouvoir que Freud a dénoncé mais dont il a permis la maintenance? C'est lorsque la femme et l’homme, seront en correspondance, d'homme et de femme en corrélation, de père et de mère, que l’enfant attestera dans sa dimension de sujet, la prévalence du réel du corps vivant dans le cosmos, pour un effacement des fantasmes de culpabilité, de souffrance et de mort, où l’ordre de l’amour fera corps avec ceux du savoir et de l’art, dont la musique est peut-être l’essentiel signifiant.
Ce qui conduit à cette interrogation corrélative: pourquoi Freud est-il resté fermé à la musique, tellement porteuse de ce que Freud lui-même a souligné, repris par Lacan, les interférences des signifiants, créant l’ordre du génie inventif du musicien déjà dans la parole qui est chant.
En ce point peut-on tenter une approche du refoulement freudien? Ces deux disciplines, psychanalyse et musique, portent parfois au coeur de l’extrême de l’angoisse, mais aussi de la joie... Freud serait-il resté méfiant à l’égard d'une ouverture de liberté, d'un horizon d'émerveillement, de sérénité et de joie possible assujetti quelque part à un interdit judaïque ? Quel est le module du crédit porté aux croyances religieuses ? Pouvoir absolu de Dieu auquel Abraham a obéi sans égard à Sara ?
La technique moderne a permis à la musique de rejoindre toujours Jupiter, cause de la condamnation de Galilée. Mais il aurait fallu un pas de plus donné à la vie de Glenn Gould, posant l’énigme de la mort précipitée.
A ceci, au-delà et en deçà des techniques extrêmes, il est nécessaire d’ajouter le questionnement posé par ce qui est désigné du terme de maladie mentale.
Tous les cadres nosologiques dont nous avons hérité ne font qu'enfermer la personne atteinte dans les impasses dont elle est issue. Et l’impasse fondamentale est celle de la connivence avec la mort et la souffrance. Ceci conditionne les états dits dépressifs, l’euphorie politique et guerrière, enfermant le sujet à peine esquissé dans les mailles du pouvoir du Grand Autre.
La relation sexuelle est probablement l’impact dans le réel, où l’inconscient est le facteur le plus déterminant. D'autant plus peut-être que les particules les plus opératoires sont les plus efficaces et les moins apparentes, et ceci d'autant que leurs agencements créent des circuits, d'où la lucidité ne se montre pas. Les jeux érotiques témoignent de ces chassés croisés, où deux éléments fondamentaux s'affrontent, masqués ; la pulsion de mort et l’ordre de la vie. Le désir
est incertain entre ces contraires. D'où la structure de la psychose et probablement de l’hystérie.
La mort peut survenir à des échéances variables, éparses. Seul le désir de vie, dominant, peut créer une harmonie dont le mécanisme demeure tout autant obscur. Mais la durée, la permanence, attestent la vérité possible de l’amour récusant la mort.
Mais ceci n'est qu'une hypothèse qui n’atteint son accomplissement que dans chaque cas particulier, pas à l’abri d’ailleurs des résurgences de violence toujours aux aguets.
La jalousie qui crée la prévalence de l’image de l’autre est peut-être l’axe du plaisir de la discorde née de la castration, l’image effaçant le réel. II y a jouissance de l’image dans le fantasme et réjouissance du corps dans le réel. Ce destin différent est né de Freud. Quant à Galilée il nous offre l’immensité du monde lumineux face à l’obscurité de la geôle papale.
Entre le monde et le corps, corps de surcroît clivé sexuellement, les références offertes à chaque sujet le conduisent à tenir compte d'une alliance ou d'une violence, entre son corps et l’immensité du monde. Le monde, terrestre et stellaire, offre une telle beauté, qu'on ne peut être qu'étonné, des spectacles de destruction auxquels l’homme se complaît.
Mieux que le Christ en croix, cette peinture de Boticelli, représentant Marie apprenant à lire à Jésus enfant, nous offre ce que nous n'osons pas concevoir ; détacher le Christ de son support de torture et le faire revivre. Certes on dit qu'il serait ressuscité. Peut-être ressuscite-t-il dans chaque enfant nouveau-né ? Destiné à corriger les insuffisances des ancêtres ? Mais il subit les mêmes sévices.
Ce qui compte, fondamentalement, c'est le bien opéré par le signifiant entre l’imaginaire et le réel. Et la structure signifiante de base est certainement représentée dans le désir d'enfant conçu à parts correspondantes entre l’adulte et l’enfant, pour l’advenir de sujet de ce dernier.
Le Christ sur la Croix est le “ a ” de la mort. La musique, la peinture, la sculpture, le texte poétique, dans les signifiants spécifiques qui les animent, peuvent effacer la figure du Christ mort et ouvrir l’adulte, à partir de l’enfant, vers une nouvelle éthique. C'est là, la portée des oeuvres de Freud et de Galilée.
La nosologie psychiatrique n'a plus aucun intérêt. Elle ne fait que cataloguer selon des symptômes. Elle fait obstacle au discours du sujet souffrant et permet plus facilement de l’incarcérer matériellement et chimiquement, si ces méthodes sont mal adaptées ou excessives.
Galilée a été emprisonné, non pour syndrome mental, mais pour contestation de l’idéologie de l’église, laquelle demande à être reprise sous l’angle de la pathologie. C'est là que s'insère le discours de Freud allié à celui de Galilée.
La pathologie mentale et l’idéologie culturelle sont à reprendre à partir de ce double discours pour une remise en question de la castration, pour un advenir de la différence sexuelle vers une prévalence de l’ordre de la vie et non de la mort. Morts fantasmatiques des adultes dans le plaisir des conflits représentés, morts réelles indéfiniment multipliées par l’indécence des techniques ; perversion du désir de connaissance, néantisé même par l’insuffisance du corps médical à l’égard du sujet. Alliance parfois des pseudo-éthiques conduisant au meurtre du nouveau né, que l’on se plaît à répéter au fil des générations. Or il existe chez le petit enfant un désir profond de vérité, car il désire qu'on lui réponde correctement sur la mort et sur la différence sexuelle peut-être en fonction de sa prodigieuse vitalité.
Y a-t-il un schématisme chez Freud faisant du sexe l’axe des conflits mais aussi de leur résolution, et chez Galilée un référent cosmique, tout autant univoque mais aussi exemplaire pour l’intelligence possible de l’homme ?
Chez tous deux c'est une mise en question du Grand Autre, et la mise en avant de I’intellect et du corps de chacun.
Freud interroge l’intimité de deux sujets sexués, Galilée contemple les étoiles à partir de l’intellect et de la beauté du ciel.
Les Rois Mages font-ils le lien entre les deux? Ils font leur route sur l’indice d'une étoile, référente du nouveau-né.
Le signifiant donne au corps du sujet la marque de son désir de vie et de création. Il n’y a pas de signifiant sans corps et si les Rois Mages vont à Bethléem, si le voyage est le signifiant nécessaire, il est donc à faire. Ce qu'ils ont accompli.
Et c'est peut-être l’enfant qui signe l’alliance exemplaire du corps et du signifiant pour donner à la vie la prévalence radicale, dans les meilleures correspondances.
Si Lacan s’est plu à répéter: “II n'y a pas de rapport sexuel ”, il voulait indiquer la place du signifiant face au “ a ”.
Le désir érotique persiste le long des siècles en assurant la propagation de l’espèce, plaçant tout sujet possible comme exécuteur obédient d'une loi qui le dépasse, mais qu'il doit dépasser à son tour.
On a introduit la notion d'amour qui existe certes de temps en temps, mais le plus souvent ce n'est que la violence qui préside à l’accouplement ; violence reflet de I’obscurantisme érigé en comportement d’adaptation.
Galilée a été victime d'une idéologie trompeuse mais son intellect ouvert à la beauté du
monde cosmique fait pacte d'amitié avec l’interrogation de l’angoisse et l’introduction du désir de savoir de tout sujet.
Reste à l’homme et à la femme de parfaire leur rencontre pour donner à l’enfant créé la stature de ce qu'il représente.
II est probable que la naissance de l’enfant représente le noeud de l’agencement de la différence sexuelle, et que tout être humain doit débattre de son autonomie face aux impositions de ce qui est grégaire dans l’entourage qui l’enferme.
Qui désire l’enfant ? L'homme, la femme, à titre individuel et corrélatif ou le pouvoir social ?
La loi judaïque impose des références lorsque l’enfant est là, mais elle ne décide pas de sa naissance.
C'est la loi chrétienne qui décide de l’origine par l’ange de l’Annonciation. St Joseph et la Vierge Marie ne sont que les exécutants. A titre individuel le désir d'enfant peut provenir de l’homme, mais plus souvent de la femme. Parfois le désir est conjoint, et signe ainsi l’impossible de la violence. Si l’utérus est garant de la création primordiale c’est-à-dire de la vie, il ne peut être exclu au nom de la castration.
Une deuxième Renaissance est évoquée par Verdiglione. Est-ce possible ? Qu'est-ce que la première Renaissance a manqué ? Ou qu'est-ce qui n'a pas été entendu? Malgré l’immense apport de Dante, de Boccace, de Pétrarque, de Giotto, de Duccio, de Fra Angelico, des premiers siennois et de l’ordre de la musique, où, comment s'est produit la cassure de ces innovations ? Et Malraux aurait-il eu raison de dire que le XXIème siècle serait religieux ou ne serait pas ? C’est-à-dire un siècle de croyances, de soumission et non de lucidité.
Le troisième millénaire donnera-t-il à notre terre cette ouverture manquée jusqu'à présent, et que Galilée avait dû fermer pour sauver sa vie car il aurait risqué la fin de Giordano Bruno.
Jünger, décédé près de sa 103ème année, percevait au début de sa vie dans sa première rencontre avec la comète de Halley, l’univers ouvert par son père et ceci renouvelé en Malaisie des décennies plus tard, nous a-t-il pointé l’immensité d'un réel qui ne peut nous être étranger?
Zwei Mal Halley. C'est le titre de ce livre écrit en 1986, à 91 ans, quand il revoit pour la deuxième fois la comète de son enfance. Conjonction pour lui de l’ordre du monde et de la curiosité de l’observation personnelle. Ordre cosmique donnant la main à l’ordre humain pour fonder le monde des correspondances, dans toute l’ampleur de la vie dégagée de cet héritage des instances de mort, car l’homme porte toujours l’horizon de son advenir, et le souvenir pieux de son passé.
Freud directement interrogé par le corps au départ par la circoncision interroge l’acte sexuel afin qu'il puisse envisager la tendresse, l’attention, la réjouissance, dans ce qui, dans la différence sexuelle crée accords et concordances et dont la consécration suprême sera la création de l’enfant.
Ce qui place la différence sexuelle dans la présence du pénis d'un côte et de l’utérus de l’autre et non plus dans la présence du pénis d'un côté et son absence de l’autre.
Les pulsions partielles ne conviennent qu'à la manipulation et non à la rencontre, car il s'agit dans leur étale, plus de jouissance liée à la violence, que de réjouissance liée à l’amour, par ce lien prévalent fait à l’objet.
Le phallus détaché devient objet “ a ”.
Freud malgré son ambition est resté fixé à la castration et à l’ordre du meurtre de l’enfant signé par Dieu, avec l’excuse du signe de l’alliance.
Le désir de Sara, n'a pas été entendu, c'est-à-dire que l’enfant vive, sans mutilation et sans restriction. Certes l’animal a remplacé l’enfant et il est interdit de manger sa viande. Et les enfants parfois contestent qu'on tue les animaux pour les manger; l’animal devenant un objet oral, prototype des liens de la main, de la bouche, de la langue, et des dents pour un effacement de la parole et de l’écriture.
Si j'ai évoqué Galilée, c'est en fonction de la grandeur de l’univers cosmique mis en exergue, face à la petitesse et à la violence de l’objet “ a ” dont l’ultime représentation est la castration, qu'il ne s'agit pas d'assumer mais de dépasser. Ainsi s’exprimait Serge Leclaire qui avait abandonné son patronyme judaïque. En quoi le désir consiste-t-il ? Quel est le noeud, la racine du désir : dans la destruction de la personne par l’objet, ou sa création par le signifiant dans le réel des correspondances de connaissance, d'amour et de beauté ?
Pourquoi maintenir depuis des millénaires un tel collage à la douleur, à la violence et un plaisir de la mort ? Le pape a incarcéré Galilée. Geste symbolique certes qui n'avait pas la brutalité de la Tour de Londres, mais enfermement, rétrécissement de l’intellect y compris celui de la papauté.
N'y aurait-il pas une autre énergie, une autre intelligence si l’homme était connoté dans sa dimension cosmique, et non plus enfermé dans son narcissisme terrien délétère, même avec l’horizon pythagoricien de la croyance en l’immortalité céleste des âmes ?
La femme aurait-elle un corps, articulé à l’ordre du chiffre, éloignant toute notion d'impureté, afin d’ouvrir à l’homme un horizon où la différence sexuelle, serait prototype de toutes les différences en connotation ?
Le doigt de Dieu de Michel-Ange rejoint celui de l’homme, car c’est de ce dernier que Dieu apprend la vérité de la vie dont l’enfant est porteur.
Glenn Gould a-t-il exaucé cette dimension en envoyant dans l’espace la musique de la terre pour d'autres mélomanes éventuels, extra-terrestres ?
Si nous restons terriens, nous pouvons élargir notre destin si notre désir de vie se dégage des systèmes mortifères réducteurs. Le désir propre d'un sujet dans un signifiant de son choix, donne libre cours à la succession des actes qui inscriront dans le réel les marques de ses temps, dans les correspondances de multiples signifiants.
Et peut-être qu'une vue du ciel nous donnera parfois un apaisement voisin de celui d'une symphonie. Ces diverses dimensions ne s'excluant pas et pouvant fonctionner en correspondance.
Peut-être y a-t-il dans cette vue lointaine, le meilleur statut de sérénité et de pacification où l’homme saisit sans drame, l’immense distance du temps et de l’espace, malgré le raccourci de la mort. Ce qui faisait dire à Sénéque: “II ne saurait y avoir d'exil sous le firmament car rien n'y est étranger à l’homme.” (2)
Une vie sereine serait-elle aussi avec les chiffres, les chiffres des étoiles sans figuration divine ?
Est-il possible, judicieux, de donner une place, plus ou moins importante, variable selon les cas, entre les chiffres cosmiques et les chiffres humains?
Le corps féminin semble présenter des caractéristiques pleines de variances et d'exactitude, plus performantes que le corps masculin, dans le registre des rythmes, des cadences de la vie et des chiffres des accords.
A l’opposé l’homme veut la maîtrise des chiffres pour le pouvoir et les mises à mort.
Les chiffres des hommes nous émerveillent sur la grandiloquence du temps, de l’espace et du monde des astres. A l’opposé les chiffres des règles, détergent la honte, pour introduire l’ordre de la mesure, dans l’ordre de la vie et de la beauté.
Hubert Reeves nous propose un contraste ; d'un côté l’exactitude des chiffres, cernant le dynamisme du monde : “Les galaxies s'éloignent les unes des autres. La matière cosmique se refroidit et se dilue. Qu'en est-il de son avenir ? Ce refroidissement amorcé il y a plus de quinze milliards d'années, va-t-il se poursuivre indéfiniment?” (3)
Et d'un autre côté il signale leur insuffisance : “Mais les difficultés énormes que rencontrent aujourd’hui les spécialistes de la logique mathématique pour établir une logique cohérente et universelle ne nous permettent pas d'être très optimiste quant à l’issue d'une telle entreprise.” (4)
Et peut-être, le corps féminin interroge-t-il avec davantage d'acuité que ne le fait l’intellect masculin ces interférences de mal être et de bien être.
Paul Mathis
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