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Naissance de Charlot/Footlights

7 Février 2018 , Rédigé par grossel Publié dans #pour toujours

C'est le 7 février 1914 qu'apparaît pour la 1° fois à l'écran, le personnage de Charlot, 104 ans aujourd'hui. Charlot est sans doute un des personnages les plus intéressants inventés par le cinéma muet. Guillaume Le Blanc en fait la figure de la précarité dans son essai L'insurrection des vies minuscules.

Charlot sans doute m'inspirera pour un monologue qu'on me demande d'écrire: faire rire du noir du monde actuel et à venir. Défi qui me tente beaucoup. Je vois déjà que le fil rouge du funambule sera une histoire de place. Suis-je à ma place, à la bonne place, n'ai-je pas pris votre place, y a-t-il de la place pour tout le monde, toutes les places sont prises, attendez votre tour, on peut décliner un nombre important de situations, c'est la lutte des places. C'est le titre de ma 1° pièce.

En octobre 2014 a été publié le seul roman de Charlie Chaplin, Footlights, écrit en 1948, après avoir été oublié pendant 60 ans dans des tiroirs à Bologne. Footlights inspira le scénario de Limelight, le dernier film américain de Chaplin (1952).

JCG

Charlot, roi du cinéma depuis 101 ans

Publié le 07/02/2014 à 03H33, mis à jour le 31/07/2014 à 19H46 par Culture box, francetvinfo

Charlie Chaplin n’a pas attendu de créer le personnage de Charlot pour être acteur. Son premier film sous la défroque du célèbre vagabond est sorti le 7 février 1914. Aujourd’hui, Charlot a donc 100 ans ! Déjà célèbre et promise à une carrière plus importante encore, sa silhouette reconnaissable entre toutes devint rapidement une icône, sinon l’icône emblématique du cinéma.

Enfant de la balle Le 16 avril 1889, Charles Spencer Chaplin naît dans un foyer miséreux de Londres. Le père est la plupart du temps absent du domicile conjugal et sa mère, qui a mille peines à joindre les deux bouts, sera internée en hôpital psychiatrique, alors qu’il n’a que 14 ans. Charles est cependant un enfant de la balle : sa mère, Hannah, était artiste de music-hall en galère et son père, Charles Sr., chanteur populaire... alcoolique.

Charles monte toutefois très tôt sur les planches, remplaçant sa mère dans un rôle à l’âge de cinq ans sur une scène d’Alderschot (sud-ouest de l’Angleterre). Une prestation qui ne devint pas une habitude, mais une voie dans laquelle l’encouragea Hannah, détectant chez sa progéniture une « sorte de talent ». Quand il a dix ans, son père le fait intégrer, grâce à son réseau, la troupe de danseur, très populaire, des Eight Lancashire Lads. Le jeune garçon se produira ainsi sur les scènes de music-hall en 1899 et 1900. Mais il n’a guère de goût pour la danse et désire devenir acteur de comédie. Toujours scolarisé, en parallèle, il abandonne l’école à l’âge de 13 ans et devient ouvrier dans une usine, enchaînant les petits jobs à droite, à gauche.

Inscrit chez un agent artistique à 14 ans, il trouve rapidement sa place comme comique et jouera notamment dans une adaptation théâtrale de Sherlock Holmes qui l’emmène en tournée jusqu’en 1906. Il enchaîne les rôles, ne cessant de gagner en notoriété, jusqu’à être en haut de l’affiche quand il a 18 ans. Mais la notoriété n’est pas encore au rendez-vous. Chaplin avant Charlot Le frère cadet de Charles, Sidney, avait rejoint la célèbre troupe britannique comique de Fred Carnot comme première vedette, ce qui lui permit de l’y introduire. Après diverses prestations plus ou moins convaincantes, il obtient un rôle principal en 1910 qui lui permet d’être ovationné par le public et la presse. Karno l’emmènera par deux fois en tournée aux Etats-Unis, où les critiques le saluent comme "l’un des meilleurs artistes de pantomime". C’est lors de sa deuxième tournée, qu’un responsable de la Motion Picture Company l’ayant repéré au théâtre lui proposa un contrat pour remplacer la vedette du studio californien Keystone, Fred Mace, désireux de prendre sa retraite. Les studios hollywoodiens sortent alors de terre et Chaplin y débarque en décembre 1913, sous la gouverne de Mack Sennett qui dirige la Keystone. Le nouvel arrivant n’est pas convaincu par les comédies qu’on lui offre, les qualifiant de "grossières". Sa première prestation, dans "Pour gagner sa vie" où sa silhouette est calquée sur celle de Max Linder, ne lui apporte que déception.

Il profita néanmoins de cette période pour observer le cinéma à l’œuvre, ce qui ne sera pas inutile par la suite, quand il deviendra réalisateur. Mais dès son deuxième film pour la Keyston, Chaplin introduit son personnage de vagabond, qui ne s’appelle pas encore Charlot, dans "L’Etrange aventure de Mabel" où sa fameuse silhouette apparaît pour la première fois à l’écran.

L'Etrange aventure de Mabel (1914), première apparition du costume de Charlot (11 mn)

Pour l’heure, tout est dans le costume : "Je voulais que tout soit une contradiction : le pantalon ample, la veste étriquée, le chapeau étroit et les chaussures larges… J'ai ajouté une petite moustache qui, selon moi, me vieillirait sans affecter mon expression. Je n'avais aucune idée du personnage mais dès que je fus habillé, les vêtements et le maquillage me firent sentir qui il était. J'ai commencé à le connaître et quand je suis entré sur le plateau, il était entièrement né", écrira Chaplin dans son autobiographie, "The Happiest Days of my Life". Le vagabond devient Charlot Le premier film où Charlie Chaplin donne à son personnage le patronyme de Charlot sort le 7 février 1914 : "Charlot est content" ("Kid Auto Races at Venice") signé Henri Lehman. Etrangement, le film sortit en salle deux jours avant "L’Etrange aventure de Mabel", alors qu’il fut réalisé après.

Charlot est content de lui (1914) première apparition de Charlot sous le patronyme

Ses suggestions auprès des metteurs en scène concernant son personnage sont systématiquement refusées, mais dénotent très tôt son ambition de contrôler sa vie artistique. Son cinquième film a le titre prémonitoire de "Charlot fait du cinéma" et voit le vagabond, engagé comme acteur, créer un pugilat sur le plateau. Il parvient à convaincre Mack Sennett de passer derrière la caméra tout en restant acteur, et réalise son premier film, sorti en mai 1914, "Un béguin de Charlot" (ou "Charlot est encombrant" – "Caught in the Rain" en VO). Depuis qu’il est à la Keystone, Chaplin a adopté un rythme de travail de stakhanoviste, travaillant six jours sur sept, et bouclant un film par semaine !

"Un béguin de Charlot" (1914), première réalisation de Charlie Chaplin (9m58)

Le succès, plutôt le triomphe, va rapidement grandissant, aux Etats-Unis comme à l’international. Il impose son véritable style et tournera quasiment toutes ses comédies pour le studio. Charlot apparaît dans un premier long métrage d’une heure quinze, dirigé par Mack Sennett en novembre 1914, "Le Roman comique de Charlot et Lolotte", où Charlot dépouille une brave campagnarde avant de se marier avec elle quand il apprend son riche héritage… Charlot, phénomène culturel Son contrat à la Keystone arrive à terme à la fin 1914. Trop gourmand, Chaplin est remercié par Sennett. Le salaire hebdomadaire de 1000 dollars réclamé est augmenté par les studios Essanay qui lui offrent 1250 dollars par semaine. Il est maître de ses films et découvre une jeune secrétaire, Edna Purviance, qu’il dirige dans « Charlot fait la noce », puis dans 35 films au total. Jusqu’alors dépourvu de vie sentimentale, en s’investissant corps et âme dans son travail, Chaplin vivra une idylle avec elle jusqu’en 1917, première de ses nombreuses conquêtes et quatre mariages qui alimenteront la chronique. Jusqu’alors mauvais garçon, un rien méchant, le personnage de Charlot s’adoucit, ce qui fait le bonheur de la critique qui lui accorde plus d’attention, avec notamment « Le Vagabon » (1915), puis « Charlot, garçon de banque ». Après sa silhouette vestimentaire, le personnage acquérait une psychologie plus compassionnelle, voire mélancolique, qui ne le quittera plus.

Chaplin n’est pas dans le cinéma depuis deux ans, que son succès dépasse ce seul domaine. Il devient un véritable phénomène culturel aux Etats-Unis, comme à l’étranger, s’expatriant dans la bande dessinée, la chanson, les figurines et poupées. A partir de 1922, le peintre Fernand Léger en fait plusieurs représentations graphiques, déduite du cubisme, allant jusqu’à réaliser et filmer un pantin animé à l’effigie de Charlot dans "Ballet mécanique" en 1924.

"Le Ballet mécanique" (1924) de Fernand Léger

Charlot enchaîne les studios En fin de contrat en décembre 1915, Chaplin se fait encore plus gourmand. Déclinant les offres des majors Vitagraph, Fox et Universal, il accepte de rejoindre la Mutual qui lui offre un pont d’or pour en faire un des hommes les mieux payés du monde, avec un studio qui lui est propre. Le vagabond est devenu millionnaire. Ce que ne manquera pas de lui reprocher la presse, le patron de la Mutual leur rétorquant "Nous pouvons nous permettre de payer ce large salaire annuel à M. Chaplin car le public veut Chaplin et paiera pour le voir". Les historiens du cinéma estiment que les films de Charlot réalisés à la Mutual sont parmi les meilleurs de l’acteur-réalisateur, parmi lesquels : "Charlot policeman", "Charlot fait une cure", "L’Immigrant" ou "Charlot s’évade". Après la Mutual, Chaplin passe à la First National de 1918 à 1922, avec comme agent artistique son frère Sidney, et construit son propre studio. "Une vie de chien" en 1918 est qualifié par le père de la critique de cinéma française, Louis Delluc, comme "La première œuvre totale de cinéma". L’acteur s’engage alors dans l’effort de guerre, battant campagne dans tous les Etats-Unis, puis réalise et interprète "Charlot soldat", où le personnage est projeté dans les tranchées : énorme succès en 1918.

"Une vie de chien" (1918) de Charlie Chaplin : extrait

Il réalise en 1921 un de ses plus grands films, largement inspiré de sa vie de misère en Angleterre et de sa malheureuse expérience sentimental avec l’actrice Mildred Harris, âgée de 17 ans : "The Kid". Toujours vagabond, Charlot n’en devient pas moins le tuteur d’un gosse espiègle et turbulent qui lui en fait voir des vertes et des pas mûres… A partir du "Kid", Chaplin ne réalisera plus de de court-métrage, s’en tenant strictement aux longs.

"The Kid" (1921) de Charlie Chaplin : extrait

Les Artistes Associés Au début des années 20, Chaplin réclamant toujours plus d’argent, plus de temps et plus d’indépendance pour ses films, quitte la First National pour fonder avec l’actrice Mary Pickford, l’acteur Douglas Fairbanks et le réalisateur D. W. Griffith la maison de distribution United Artist (Les Artistes associés) qui existent toujours de nos jours. Le quatuor, composé des plus grands acteurs et réalisateurs de leur temps, crée un précédent à Hollywood, les cinéastes ayant pour la première fois le plein contrôle sur leur création.

Le studio écope pourtant d’un premier échec signé Chaplin, sans Charlot, "L’Opinion publique" (1922), un mélodrame. Le public ne répond pas à l’appel, qui ne jure décidément que par Charlot. Le cinéaste se rattrape avec "La Ruée vers l’or" en 1925, un de ses meilleurs films et le plus complexe à réaliser, avec 600 figurants, des décors démesurés et des effets spéciaux complexes. Le film réclame 16 mois de tournage. Charlot y est prospecteur dans les montagnes enneigées du Montana, affrontant la rudesse du climat et cherchant autant l’or que l’amour. Le film contient parmi les scènes les plus célèbres de son répertoire, avec l’épisode où, mort de faim, Charlot mange ses chaussures, la danse des petits pains, pour laquelle, comme à son habitude, Chaplin écrivit la musique, et la bascule de la cabane au sommet d’un pic enneigé, qui servira d’affiche.

"La Danse des petits pains" dans "La Ruée vers l'or" (1925) de Charlie Chaplin

En 1928, Chaplin sort "Le Cirque" qui lui vaut de recevoir un Oscar d’honneur lors de la première cérémonie de l’académie des Arts et Techniques "pour sa polyvalence et son génie à jouer, écrire, mettre en scène et produire ‘Le Cirque’". Et pour quelques chefs-d’œuvre de plus Avec l’arrivée du parlant en 1927, les cartes se brouillent. Chaplin s’oppose catégoriquement à cette avancée technologique, estimant que cet ajout tue l’art du visuel, de la pantomime, alors qu’il se voit mal donner une voix à Charlot. Sans parler du problème que posait la vente des films à l’étranger, l’image seule, sans dialogue relevant de l’universel. C’est pourquoi il tourne toujours en muet en 1928 "Les Lumières de la ville", tout en interprétant Charlot, avec une jeune actrice, Virgina Cherril, dans le rôle d’une aveugle à laquelle il se dévoue pour lui financer une opération des yeux. Malgré son anachronisme avec le succès populaire du parlant, le film est un grand succès et la critiques voit en lui "le meilleur jeu d'acteur et le plus grand moment de l'histoire du cinéma" (James Agee).

"Les Lumières de la ville" (1928) de Charlie Chaplin : extrait

Après une pause de 16 mois au cours desquels Chaplin voyage en Europe (France et Suisse), puis au Japon, il revient à Los Angeles et constate les ravages de la Grande Dépression qui lamine les Etats-Unis. Nombre de ses films précédents mettaient Charlot dans des conditions dorénavant subies par ses contemporains ("Une Vie de Chien", "L’Immigrant", "Le Kid"…). Mais ce qui le frappe le plus sont les conditions de travail des ouvriers, avec les nouvelles conditions mises en œuvre, le travail à la chaine, dérivé du stakhanovisme russe. Il en déduit un de ses films les plus célèbres,"Les Temps modernes", toujours sous la défroque de Charlot, vêtu d’une salopette dans l’usine, tout en persistant à réaliser un film muet, sorti en 1936, alors que le procédé est devenu obsolète. Charlot y interprète toutefois une chanson inarticulé et nonsensique, "Charabia", comme pour mieux dénoncer ce que représente l’absurdité du parlant à ses yeux… ou à ses oreilles. Mais l’on y entend la voix de Charlot pour la première fois. Il y dirige dans le second rôle une jeune actrice de 21 ans, Paulette Goddard, qui devient sa troisième épouse. Succès mitigé, à l’époque, sans doute à cause de son discours anticapitaliste. Une partie de la critique ne s’y est pas ralliée pour la même raison.

"Les Temps modernes" (1936) de Charlie Chaplin : Charlot chante "Charabia"

The End Le dernier film réalisé et interprété par Chaplin dans le costume de Charlot est aussi son premier réalisé en "parlant". "Le Dictateur" sortit en 1940, alors qu’Hitler venait de déclencher la Seconde guerre mondiale et occupait la France. Chaplin tenait absolument à réaliser un film sur le Führer. Etonnant de voir ce qui rapproche les deux hommes, aux idéaux aussi contradictoires : tous les deux sont nés à quelques jours d’intervalles ; ils sont issus de milieux sociaux défavorisés et connurent un destin international ; tous deux portent une petite moustache juste sous l’arête nasale… Charlot n’y est plus le vagabond, mais un barbier juif victime d’une dictature en Europe, mais également Adenoïd Hynkel, parodie évidente d’Hitler, comme si l’assimilation entre les deux signifiait que le dictateur était un "charlot". Le Sujet est très délicat à l’époque : les Etats-Unis fournissent des armes à l’Allemagne, Hollywood évite tout sujet se référant à l’Europe, Washington n’entrant en guerre qu’en 1941, alors que le film est tourné en 1939, quand les nazis envahissent la Pologne. Son indépendance acquise depuis United Artists permet toutefois à Chaplin de faire ce qu’il veut.

"Le Dictateur" (1940) de Charlie Chaplin : la danse du ballon

Le film, très attendu, connût un grand succès et demeure une des meilleures productions de son auteur. Il affirme l’engagement politique et social que défend Chaplin, depuis des années, ce qui va se retourner contre lui. Taxé de communiste, poursuivi dans divers procès pour mauvaises mœurs (10 ans après, ce sont d'autres mots plus explicites qu'il faudrait employer, il s'agit de pédophilie), la vie de Chaplin ne se résume plus qu’à une suite de procès qui l’éloignent des plateaux. Charlot est mort, mais pas Chaplin. Mort ? Charlot est immortel ; dès que le mot "cinéma" vient aux lèvres, son image apparaît. L’un des plus grands cinéastes de son temps poursuivra son œuvre jusqu’en 1967 ("La comtesse de Hong-Kong"), mais c’est une autre histoire. Parti en Europe en 1951, son visa de retour aux Etats-Unis était révoqué le lendemain même de son départ. Après avoir connu la reconnaissance internationale grâce à sa carrière aux Etats-Unis, mais y ayant connu la gloire comme la déchéance, Chaplin déclarait : "Que je revienne ou non dans ce triste pays avait peu d'importance pour moi. J'aurais voulu leur dire que plus tôt je serais débarrassé de cette atmosphère haineuse, mieux je serais, que j'étais fatigué des insultes et de l'arrogance morale de l'Amérique."

S’il n’a pas pour autant connu la misère dans cette dernière partie de sa carrière, engendrant lui-même une dynastie de comédiens, Chaplin est resté fidèle à Charlot, paria contre l’establishment. Il y demeure viscéralement identifié pour l'éternité, avec comme crédo l’indépendance.

Naissance de Charlot/Footlights
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L'art c'est la vie - débat

13 Décembre 2017 , Rédigé par Jean-Claude Grosse Publié dans #agora

L'art c'est la vie - débat
Je réactualise cet article d'avril 2013, en lien avec la préparation de l'opération Bateau-Lavoir 2018 qui aura pour thème Le passage du temps, autour d'une exposition de photos de personnes ayant été photographiées tous les ans, même posture, même costume, pendant 31 ans par Marc Israël-Le Pelletier.
JCG
 
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Origines de Michel Bories
dans Disparition  aux Cahiers de l'Égaré

L'art c'est la vie
Éditorial d'un vieux numéro de la revue
(Art absolument)

Polémique : l’État et l’art contemporain_(l’état de l’art contemporain en France)
«… aussi intéressante soit-elle toute esthétique qui devient hégémonique produit ses suiveurs, ses “académiciens” et, de novatrice, devient non seulement normative mais répétitive – ennuyeuse…»
«… l’État n’a pas à faire prévaloir tel ou tel “réseau” d’influence, mais l’excellence là où elle se trouve. Surtout, il ne doit exclure aucun médium…»

Lorsque nous avons reçu la pétition L’art c’est la vie, qui circule parmi les artistes plasticiens, bien que nous soyons aux antipodes du vocabulaire employé, nous avons été frappés par l’exaspération non feinte dont elle témoigne, mais surtout par le fait qu’elle soit signée par plusieurs artistes que nous estimons et auxquels nous avons consacré un dossier important sur leur œuvre dans l’un de nos numéros.

Cette pétition qui, en substance, remet en question « la dérive de la politique de l’État français en matière d’art contemporain », nous a donné le désir d’interroger, par le biais d’un questionnaire plus global, quelques-uns des artistes signataires ainsi que des personnalités du monde de l’art (collectionneurs, galeristes, intellectuels, institutionnels) dont nous n’ignorons pas qu’elles sont suffisamment indépendantes d’esprit pour avoir leur propre point de vue.

Car, bien entendu, c’est par la pluralité des points de vue que nous parviendrons à faire un constat “objectif” de ce qui est à mettre au crédit de l’État en matière d’art contemporain, mais aussi ses dysfonctionnements, voire ses effets pervers.

Comme les lecteurs le savent, depuis le début de la création de notre revue en mai 2002, nous défendons les liens entre l’art du passé et celui du présent ; les artistes en France ; la diversité des médiums (peinture, sculpture, photographie, vidéo, installation), mais également des générations, des origines, des esthétiques… tous thèmes que les rédacteurs et les signataires de L’art c’est la vie abordent. D’où, pour nous, la nécessité de préciser notre position.

Nous sommes contre tout art “officiel” (déclaré ou implicite). Par éthique : l’art officiel fonctionne toujours par exclusion ; et par goût : aussi intéressante soit-elle, toute esthétique qui devient hégémonique produit ses suiveurs, ses “académiciens” et, de novatrice, devient non seulement normative mais répétitive – ennuyeuse. Y a-t-il un art “officiel” en France ? Vu du reste de l’Europe et des États-Unis, force est de constater que, à chaque fois que vous interrogez un conservateur ou un artiste de ces différents pays, il vous répond que non seulement les galeries françaises ne promeuvent pas suffisamment leurs artistes (où sont vos peintres ? Vos sculpteurs ? Vos photographes ?) mais que l’État français soutient presque exclusivement un art “critique et politique”, influencé par les conceptuels radicaux des écoles de New York et de Los Angeles des années soixante-dix (voix communautaires, féminisme, critique de la société de consommation, etc.), et que ce n’est évidemment pas avec ce courant – déjà inscrit dans l’histoire de l’art du XXe siècle – que nous parviendrons à émerger sur le marché international (notons, pour ceux que cela intéresse, que ce dernier privilégie depuis toujours la peinture, la sculpture, et depuis peu le dessin et la photographie dite “plasticienne”).

Que l’on ne se méprenne pas : notre revue est très impliquée dans la confrontation de l’art à l’histoire – aux tragédies de l’histoire. C’est bouleversant de voir comment les artistes qui les ont subies ou y sont sensibles répondent avec leurs faibles moyens – humainement, symboliquement – à la toute puissance de la barbarie. Mais de toute évidence, si Guernica est un chef-d’œuvre, c’est parce qu’il est autant une réponse au scandale du bombardement en 1937 de la petite ville basque espagnole qu’un renouvellement des formes produites par Picasso lui-même… Pour le dire autrement : à se satisfaire d’une simple dénonciation (encore que, en France, vous remarquerez que l’on ne dénonce pas grand-chose : il s’agit plutôt d’une “attitude”), l’art “critique et politique” n’est plus un art, mais un message : de l’information. Et si, aujourd’hui, nous pouvons voir l’œuvre d’un Malevitch, d’un Tatline, d’un Rodchenko, d’un Dziga Vertov ou d’un Eisenstein, c’est évidemment moins pour leur message qui, pour nombre d’entre eux, se voulaient propagandistes d’un avenir radieux inhérent à l’enthousiasme lyrique de la révolution d’Octobre, que par le formidable jaillissement de nouvelles formes nécessaires à l’efficacité de ce message : mais – autre leçon de l’Histoire – toujours dans l’exemple soviétique (on pourrait citer n’importe quel autre État totalitaire) – les “bureaucrates” ont tué soit physiquement soit psychiquement les “artistes”; et, cette lamentable mise au pas de leur propre avant-garde artistique par les tenants du Réalisme stalinien devrait en faire méditer plus d’un.

Cela dit, soyons clair : l’art n’est pas unidimensionnel. Si l’art “critique” a sa nécessité, il n’est pas le seul. L’art est, par définition, multiplicité, diversité, ouverture. C’est même ce qui différencie les grandes œuvres des autres. Si – aujourd’hui – vous pouvez relire Dostoïevski ou revoir Rembrandt, c’est parce qu’il y a plusieurs niveaux de lecture, plusieurs “régimes” du regard que vous percevez au fur et à mesure de votre propre expérience ; c’est parce que, bien qu’issues d’un contexte, surgies de lui, ces œuvres s’en affranchissent pour devenir nos contemporaines. D’aucuns diront : tout cela est dépassé (autre variante : du passé faisons table rase !). Nous ne leur rétorquons pas. Nous citerons Robert Storr, chef du département des peintures et sculptures du MOMA de New York et actuel directeur de la biennale de Venise : « Des confrontations sérieuses entre le travail des jeunes générations et celui toujours actif des précédentes, voilà où est l’avenir de l’art comme il l’a toujours été. » Et aussi : « Lancer des tendances, suivre la vague, voire flairer ou anticiper le goût ne m’intéressent pas beaucoup. Aujourd’hui, ce que font les artistes est tellement varié et si largement dispersé qu’il est réellement futile de se préoccuper comme jadis de “tendance artistique majeure”, ou même, pour être plus polémique, de vérité majeure. »

Il faut que l’État se méfie de sa propre tendance à l’instrumentalisation. Pour nous, outre son rôle prépondérant en matière d’infrastructures culturelles pouvant permettre de voir les artistes vivant en France (si nous ne défendons pas “nos” artistes, qui le fera ?) et en matière d’éducation artistique (nous y reviendrons dans un prochain numéro), il ne doit en aucun cas privilégier une esthétique au détriment d’une autre. Surtout, il ne doit exclure aucun médium : quels sont ceux qui – en France – ont décrété que la peinture et la sculpture étaient périmées alors qu’elles sont toujours d’actualité dans le reste du monde ? Au nom de quoi ? Au bénéfice de qui ? L’État n’a pas à faire prévaloir tel ou tel “réseau” d’influence, mais l’excellence là où elle se trouve. Il doit soutenir tous ceux qui promeuvent la diversité de l’art en France : d’une part, parce qu’à notre connaissance, il n’y a pas “d’art français”, et d’autre part, parce que comme ce fut le cas dans le foisonnement de l’entre-deux-guerres, une multitude d’artistes d’ici et d’ailleurs créent dans notre pays. Ce n’est pas seulement une réalité, c’est également une spécificité qui, si elle est mise en avant, peut – sans doute – emporter l’adhésion internationale (à ce sujet, une proposition : en complémentarité à ce qui est principalement montré depuis deux décennies dans les institutions muséales françaises, il nous semble qu’il serait judicieux d’organiser une grande exposition donnant à voir la peinture et la sculpture créée en France depuis les années soixante-dix jusqu’à nos jours…).

Encore un mot : nous ne prétendons aucunement détenir la “vérité”. Nous essayons simplement de répondre – avec nos propres moyens – au désarroi exprimé par les artistes eux-mêmes. C’est pour cela que, pour avoir une idée plus juste de la réalité de “l’état de l’art contemporain en France”, nous avons besoin de points de vue personnels (et indépendants). De ceux qui s’expriment ici et que nous remercions chaleureusement. Du vôtre – si vous le désirez – en rejoignant la rubrique Débats de notre site www.artabsolument.com. Notre souhait est que, par-delà les positions esthétiques de chacun, par-delà les inévitables (et souhaitables) divergences d’analyse, le débat ait lieu…

 
Pascal Amel et Teddy Tibi
 
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Mères courage de Michel Bories
dans Disparition  aux Cahiers de l'Égaré

L’État et l’art contemporain en France

Pour ouvrir le débat, nous avons décidé d’interroger une quinzaine d’artistes et de professionnels de l’art (galeristes, collectionneurs, sociologues, institutionnels) dont nous sommes loin d’ignorer que, par-delà les effets de mode, ils ont su garder leur indépendance d’esprit.

De la différence entre un artiste et un créatif
1 | Qu’est-ce qu’un artiste pour vous aujourd’hui ? Doit-on faire un distinguo entre un créatif (dans le sens où un couturier de grand talent, par exemple, lorsqu’il présente sa nouvelle collection, la crée) et un artiste qui, certes, peut vendre ce qu’il produit, mais dont l’œuvre – l’enjeu symbolique – n’est pas directement liée à cela ? Autrement dit, doit-on faire une différence entre les “artistes” qui sont liés à une nécessité intérieure et les “créatifs” qui répondent le plus souvent à une commande extérieure ? Ou, au contraire, pensez-vous que, de nos jours, tout le monde est artiste et que de faire une distinction entre les arts majeurs et mineurs, les médiums de l’art (la peinture, la sculpture, la photographie, la vidéo, etc.), et la publicité, la mode ou le design, n’est pas pertinent ?

L’art et le public
2 | On sait que, de nos jours, aller au musée, voir de grandes expositions, s’intéresser à l’art, est devenu l’un des pôles symboliques de notre société. Nous ne pouvons certes que nous en réjouir. Cela dit, sans les clefs pour mieux percevoir l’œuvre, que se passe-t-il au juste ? Ne doit-on pas se défier de la tendance à “l’art spectacle”, au “divertissement”, au “zapping” que certaines manifestations dites grand public induisent ? Si oui, comment y remédier ? Par l’éducation artistique à l’école ? Par une plus grande place de l’art et de la culture dans les grands médias nationaux ?

L’art contemporain et l’État
3 | Quel rôle l’État doit-il jouer ? Quelle(s) réforme(s) l’État devrait-il entreprendre pour que la diversité des artistes vivant en France soit mieux représentée – à Paris, mais aussi en région, et ce, évidemment, quels que soient leur médium, leur génération ou leur origine ?

Y a-t-il un art officiel en France ?
4 | Y a-t-il le choix préférentiel d’une “esthétique” au détriment de toutes les autres par les principales institutions françaises (musées nationaux, centres d’art contemporain, FRAC, CulturesFrance, etc.) – une “esthétique” qui, au fil des ans, est devenue quasi officielle ? Si oui, laquelle ? Et pour quelles raisons ?

La place de la France ?
5 | Aujourd’hui, comme ce fut le cas dans l’entre-deux-guerres, des artistes de toutes origines résident en France. Comme on le sait, la diversité (Picasso, Brancusi, Chagall, Man Ray, etc.) a fait partie intégrante de la prépondérance de la France par rapport aux autres nations du marché de l’art. Or, aujourd’hui, les artistes de la “scène française” sont peu ou prou marginalisés. Quelles sont pour vous les priorités nécessaires pour leur reconnaissance ? Comment concevez-vous le rôle des galeries ? Des fondations ? Des collectionneurs privés ? Du mécénat ? Des foires d’art contemporain ?

Histoire de l’art
6 | Sans les cinéphiles, tout le monde ignorerait le cinéma d’auteur. Sans les lecteurs passionnés de littérature, les bons écrivains qui finissent par émerger de l’édition courante. Dans les arts plastiques, les tenants de “l’avant-garde” – en déniant toute validité au regard d’autrui (des autres artistes, des critiques, des conservateurs de musée, des collectionneurs, du premier cercle des amateurs d’art, du public éclairé, etc.) – semblent cautionner une amnésie générale de l’histoire des formes permettant la promotion de “nouveautés” déjà fort éculées. Autrement dit : l’histoire de l’art (c’est-à-dire la chronique des mouvements et des œuvres qui créent un avant et un après) continue-t-elle à se constituer malgré l’uniformisation esthétique produite par les inévitables effets de modes, ou est-elle vouée à disparaître ?

 
Ernest Pignon-Ernest
Né en 1942

Son œuvre, qui fut l’une des premières à s’exposer dans la rue, mêle le dessin, l’affiche, la photographie et l’installation. Témoignant de combats sociaux, humanitaires et/ou poétique, elle allie l’élégance plastique à l’inscription ponctuelle dans un lieu. Incontournable. Signataire de la pétition.
« Flatter le sentiment de caste, d’être une élite d’avant-garde éclairée… Après “l’art qui interroge l’art”, ça se resserre : l’art qui ne parle qu’au milieu de l’art.  »

1 | Vous avez raison de commencer par ça. Cette espèce de flou, de “tout égal”, “tout se vaut” qui s’est développé au début des années Lang est sûrement une des causes des dérives que nous connaissons aujourd’hui. C’est durant cette période – et ça n’a fait que s’aggraver – que l’on a assisté à la nomination de fonctionnaires culturels émergents qui ont instillé dans le domaine de l’art des comportements tendance venus de la communication et de la mode. Il y a quelques jours, un ami collectionneur qui venait d’acquérir un Rebeyrolle m’a raconté qu’un de ces inspecteurs de l’art lui avait dit : « Vous avez vingt ans de retard… » Ce n’est pas ce qui se porte cette année.

2 | Je doute que l’on puisse vraiment “y remédier”. Cet art que vous qualifiez “spectacle” ou “zapping” est naturellement sécrété et modelé par la marchandisation généralisée de la société. Face à ce constat – excusez-moi, j’anticipe sur la question suivante –, le rôle de l’État pourrait être d’œuvrer à rééquilibrer les choix dictés “hégémoniquement” par le marché et ses ramifications. Je pense par exemple à ce qui s’est passé pour les arts dramatiques. Si, face au théâtre privé et à sa nécessaire rentabilité, il n’y avait eu les maisons de la culture puis les centres dramatiques et les scènes nationales, des œuvres comme celles de Koltès ou de Vinaver auraient-elles pu atteindre une vraie audience ? Les propositions de Vitez, Françon, Lavaudant, Py ou Sivadier, trouver leur public ? Dans le domaine des arts plastiques, les représentants du secteur public ont servilement choisi de s’aligner sur les choix du marché international et des modes imposées qui l’accompagnent. Une anecdote récente et révélatrice pour étayer ce constat : la commission chargée de choisir les œuvres liées à l’installation du tramway à Nice a abouti à la décision d’implanter une œuvre de Jeff Koons sur la place principale de la ville. Peut-on faire un choix plus convenu, plus servilement subordonné ? Qui n’a pas son caniche ? Finalement, aux dernières nouvelles, l’œuvre était trop chère, la ville y aurait renoncé ! Pour revenir à la question, bien sûr il faut souhaiter un vrai projet de sensibilisation artistique à l’école. On y rencontre des expériences remarquables qui reposent beaucoup sur la générosité, l’enthousiasme, la culture des professeurs. Souvent, ça frise l’apostolat. Il faudrait une volonté politique, c’est-à-dire aussi des moyens. Mais la question reste le rôle, la fonction de l’art au sein de la société.

3 | À voir le bilan de quelques décennies de politique “arts plastiques”, la question n’est-elle pas plutôt : l’État (et son ministère de la Culture) doit-il jouer un rôle ? Récemment, Mme Tasca a déclaré que les arts plastiques étaient entre les mains d’une nomenklatura. Dommage qu’elle n’ait pas fait ce constat lorsqu’elle était rue de Valois ! Il s’est en effet constitué – et tous les ministres de la Culture depuis trente-cinq ans y ont contribué – un véritable quadrillage du territoire, un “normatage” à la fois bureaucratique et mondain de la création. En 1984 déjà, j’ai assisté à cette scène : un conseiller artistique disait au directeur d’une galerie municipale « Si tu ne fais pas les conceptuels Allemands, t’as plus un sou. » On peut, depuis, collecter une multitude de diktats de cet ordre.
Sans que rien dans leur parcours, leur expérience ne le justifient, des fonctionnaires décident de ce qu’est, de ce que doit être l’art d’aujourd’hui. Fonctionnaires parés de tout le confort et les sécurités que cela assure… Il leur faut paraître audacieux et subversifs ! Ce désir, conjugué à la naïve et narcissique obsession de n’avoir rien loupé, en fait des gogos prêts à avaler les plus indigentes transgressions et (en se promouvant), les promouvoir. On mesurera combien, conformisme en creux, ce fonctionnement est symétrique et, dans le fond, héritier de la bourgeoisie du XIXe siècle, refusant toute innovation. On a les Bouguereau que l’on mérite. Combien de ces expositions aux provocations convenues, qui n’avaient pour objectif implicite que les commissaires apparaissent eux-mêmes pour les créateurs. Le beurre, l’argent du beurre et…
Parce qu’il aboutit à des diktats, des radiations, des censures, qu’il porte atteinte à des principes démocratiques de base, qu’il participe de fait au rejet de l’art d’aujourd’hui et en fausse gravement l’appréhension, il est évident qu’il faut remettre en cause le pouvoir dirigiste et opaque octroyé au clergé autoproclamé de l’art contemporain. Je sais, bien sûr, que certains dans ces services ont une autre conception de leur rôle et qu’ils tentent de lutter contre ces dérives… mais la peau du pachyderme est épaisse. En même temps, on pourrait se demander si ce type de comportement, notamment cette propension à s’aligner sur les goûts (des) dominants, n’est pas comme la nature de cette fonction. Un responsable de la DAP m’a assuré récemment : « Tu sais, j’ai engagé des types qui n’étaient pas dans la ligne… Six mois après, ils faisaient les mêmes choix que les autres. » Pour limiter ces formatages que génèrent les dogmatismes bureaucratiques successifs, il serait nécessaire que les institutions œuvrent essentiellement à diversifier, à multiplier les sources de commandes, de propositions, de projets d’expositions et les sources de stimulation et de financement à tous les niveaux et dans tous les secteurs de la société (régions, communes, associations, entreprises, syndicats, comités d’entreprise). Qu’elles visent à favoriser l’éclosion du plus large éventail d’œuvres dans la plus grande diversité de formes, de technologies, de médiums. C’est-à-dire le contraire du “normatage” en cours.

4 | Une esthétique officielle exigerait des choix étayés, une pensée, des critères… C’est dire qu’on ne peut pas parler d’esthétique officielle, il s’agit plutôt de clans officiels, d’artistes officiels promus en fonction des modes et des stratégies personnelles, des plans de carrière de fonctionnaires au goût et à l’échine assez souples pour aimer ce qu’il faut aimer, quand il faut l’aimer… On pourrait répertorier un jour les passions successives de certains et leurs retournements de veste… se souvenir de ces spécialistes de l’art contemporain qui professaient que la peinture était une vieillerie dont il n’y avait plus rien à attendre et qui ont trouvé subitement génial tel peintre (méprisé la veille) dès lors qu’un collectionneur éminent – c’est-à-dire riche et influent – en avait acquis quelques œuvres. Le néo-académisme en cours (qu’est-ce que l’académisme, sinon l’art fait directement pour le musée ?) est adaptable. Il peut aller du presque rien à prétention conceptuelle au bric-à-brac étalagiste kitsch. L’objet trivial, le kitsch, la dérision sont tendance… pendants plastiques de l’idéologie “fin de l’histoire”. Ce ne sont pas des choix innocents… Il est bon aussi que les œuvres n’aient aucune résonance, aucun sens en dehors des systèmes de référence convenus, en cours dans le milieu. Flatter le sentiment de caste, d’être une élite d’avant-garde éclairée… Après “l’art qui interroge l’art”, ça se resserre : l’art qui ne parle qu’au milieu de l’art.

5 | Sachant que nos institutions sont notablement mieux dotées que celles des pays comparables, cette marginalisation dit assez l’échec de la politique menée. J’espère que d’autres répondant à cette question sauront donner le pourcentage d’artistes travaillant en France exposés au centre Pompidou…

6 | Comme pour le cinéma ou la littérature, il existe des passionnés d’art plastique, j’en ai la preuve chaque jour. L’uniformisation esthétique dont vous parlez ne concerne qu’une partie ciblée de la création, celle qui pour l’essentiel propose des œuvres fabriquées à dessein pour plaire et répondre à la demande du moment. Mais l’histoire a montré que les œuvres véritablement novatrices, exigeantes et chargées, qui ne parlent pas que d’elles-mêmes, mais de l’art, de notre temps, des hommes, de leur vie, de leur mort, sont rarement celles promues par les instances officielles de légitimation.

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Le temps fait son oeuvre de Michel Bories
dans Disparition aux Cahiers de l'Égaré
 

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Visite à Marcel Conche

11 Juin 2017 , Rédigé par grossel Publié dans #J.C.G.

le monastère de Brou, le lac Genin, lieu de la légende de la Vouivre, les vins du Bugey
le monastère de Brou, le lac Genin, lieu de la légende de la Vouivre, les vins du Bugey
le monastère de Brou, le lac Genin, lieu de la légende de la Vouivre, les vins du Bugey
le monastère de Brou, le lac Genin, lieu de la légende de la Vouivre, les vins du Bugey
le monastère de Brou, le lac Genin, lieu de la légende de la Vouivre, les vins du Bugey
le monastère de Brou, le lac Genin, lieu de la légende de la Vouivre, les vins du Bugey
le monastère de Brou, le lac Genin, lieu de la légende de la Vouivre, les vins du Bugey
le monastère de Brou, le lac Genin, lieu de la légende de la Vouivre, les vins du Bugey

le monastère de Brou, le lac Genin, lieu de la légende de la Vouivre, les vins du Bugey

du 6 au 9 juin 2017, visite à Marcel Conche (95 ans passés) avec François Carrassan;

le 6, bouchons et ralentissements grâce aux Pentecôtistes qui rentrent après un jour de plus pour éviter les bouchons; merci !

nous passons 2 H en fin d'après-midi avec Marcel (nous sommes à Treffort) qui continue à réfléchir et à écrire sur des questions qui l'interpellent (quelles traces son éducation chrétienne a-t-elle laissé dans son oeuvre ? la morale ?);

le 7 au matin, visite du monastère de Brou, deux bonnes heures, je m'attarde devant le retable de Marie appelé les 7 joies de Marie (le 1° juillet, je leur fais le coup des 7 joies de Madeleine aux écrivents de l'été du Léthé à La Coquette), je médite devant le crâne d'une cellule de moine:

cher Hamlet, tes questions to be or not to be ne sont pas mes questions, je ne suis qu'éloise dans la nuit éternelle comme dit Montaigne et ne mérite pas le nom d'être, tout apparaît pour disparaître selon la métaphysique de l'apparence absolue de Marcel, ta conception de la non-séparation entre dormir, rêver, mourir peut-être, je ne la pratique pas, mais il est vrai que depuis peu, je suis sensible à l'unité corps-esprit, à l'intelligence sous les automatismes et l'inconscient, à la permanence sous l'impermanence, à l'éternité sous le temps qui passe (je vais t'écrire plus longuement);

à la librairie, je tombe sur Hildegarde de Bingen et sa petite pharmacie domestique, un ensemble incroyable de remèdes naturels (ils auront droit à regarder les recettes le 1° juillet pour se guérir de leurs mots émaux);

à midi, repas en famille, longs échanges avec le petit-fils, je n'ai pas le réflexe de ramener Marcel au centre des échanges, il est un peu mis de côté, malaise; notre hôtesse est chaleureuse, elle a accueilli un couple de réfugiés kosovar, sans papiers, accueil un peu difficile jusqu'à ce que la maire du village les reçoive officiellement;

le soir, nous optons pour l'auberge bressane, face au porche de l'église du monastère de Brou, au soleil couchant; préparatif des soirées son et lumière, nous avons droit à des musiques sacrées et profanes, le service est impeccable, un peu surréaliste avec le maître d'hôtel, Jérôme, un tentateur des plaisirs de bouche, repas sublime avec des plats de grande classe et mignardises diverses accompagnés de Manicle, servi dans des verres armoirés AB, je déguste avec et pour AB1, AB2, une improbable AB3, jeux de quel inconscient ? nous avons choisi le menu du marché dit le jardin du pêcheur, je vais féliciter le chef Jean-Pierre Vullin, la chef pâtissière Ginette, je demande à Jérôme si je peux avoir un défilé de 3 calèches en 3D avec la comtesse qui dîne à côté de nous, ce sera pour la prochaine fois, répond-il, le prévenir 48 H avant;

le 8, direction le lac Genin sur demande expresse de Marcel, il y a amené Émilie, Pilar Sanchez, Catherine; promenade dans les herbes fleuries,

je m'essaie à dire, trébuche, je connais si peu les noms, je me contente de voir, savourer la biodiversité, je suis dans le vent et sous le vent, je n'ai pas mon portable, je ne l'emporte jamais et ne peux donc utiliser l'application permettant de reconnaître les plantes; je vais la chanter la biodiversité ne sachant distinguer bleuets, luzerne, trèfle, pâquerettes...;

au retour, nous passons 2 H 1/2 avec Marcel, le petit-fils est là; à un moment Marcel me demande: quand tu décides quelque chose, est-ce que tu sais ce que tu fais, courte réflexion, il me semble que non mais j'assume les effets pervers s'il y en a, eh bien je crois que quand j'ai décidé de partir en Corse, je ne savais pas ce que je faisais; tout le reste du temps a porté sur l'épisode Émilie, qu'est-ce qui l'avait fasciné chez elle, il le sait, le dit, le petit-fils conteste,

(le livre Le Silence d'Émilie édité aux Cahiers de l'Égaré, sorti en 2010, a obtenu le prix Jean-Jacques Rousseau, épuisé);

passionnantes nos interrogations permanentes sur nos amours qui restent toujours et pour toujours mystérieuses donc vivantes ?

passage au caveau du Revermont, caverne d'alcoolibabacool, achat de deux bouteilles de Bugey, un blanc, le spleen de Pauline qui sera là le 1° juillet, un rouge, l'ode à Madeleine, au centre de nos écritures ce jour-là, passage à la fromagerie de Treffort, inscrite sur la route du Comté, quelques chèvres, du comté, du bleu de Bresse;

le 9, retour sans problème de ralentissement; heureux de retrouver la maison, la chatte, les âmes et leurs ombres lumineuses; photos François Carrassan

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La poésie en politique, dans la vie, à l'école

26 Avril 2017 , Rédigé par grossel Publié dans #J.C.G.

Pour une école du gai savoir, 2004, pas une ride

Pour une école du gai savoir, 2004, pas une ride

On a vu l'impact de la lecture de poèmes bien interprétés lors des réunions publiques de Jean-Luc Mélenchon, pendant la campagne présidentielle du 1° tour. Hugo, Eluard, Ritsos, Prévert et d'autres sont venus conclure ces réunions, donnant un souffle différent, élargissant l'horizon, faisant monter une autre émotion, quelque chose de moins éphémère que la parole politique, un moment d'éternité aussi intense que la minute de silence pour les noyés de la Méditerranée à Marseille (le seul à avoir eu un tel geste, merci).

La poésie dans la vie, c'est la lire, la dire, l'écrire. Elle accompagne, apaise, par exemple, il y a des poèmes de "deuil" magnifiques quand on a perdu quelqu'un, je pense à celui d'Elizabeth Frye:

Ne reste pas là à pleurer devant ma tombe,
Je n'y suis pas, je n'y dors pas...
Je suis le vent qui souffle dans les arbres
Je suis le scintillement du diamant sur la neige
Je suis la lumière du soleil sur le grain mûr
Je suis la douce pluie d'automne...
Quand tu t'éveilles dans le calme du matin, Je suis l'envol de ces oiseaux silencieux
Qui tournoient dans le ciel...

Alors ne reste pas là à te lamenter devant ma tombe
Je n'y suis pas, je ne suis pas mort !
Pourquoi serais-je hors de ta vie simplement
Parce que je suis hors de ta vue ?
La mort tu sais, ce n'est rien du tout.
Je suis juste passé de l’autre côté.
Je suis moi et tu es toi.
Quel que soit ce que nous étions l'un pour l'autre avant,
Nous le resterons toujours.

Pour parler de moi, utilise le prénom
Avec lequel tu m'as toujours appelé.
Parle de moi simplement comme tu l'as toujours fait.
Ne change pas de ton, ne prends pas un air grave et triste.
Ris comme avant aux blagues qu'ensemble nous apprécions tant.
Joue, souris, pense à moi, vis pour moi et avec moi.
Laisse mon prénom être le chant réconfortant qu'il a toujours été.
Prononce-le avec simplicité et naturel,
Sans aucune marque de regret.

La vie signifie tout ce qu'elle a toujours signifié.
Tout est toujours pareil, elle continue, le fil n’est pas rompu.
Qu'est-ce que la mort sinon un passage ?
Relativise et laisse couler toutes les agressions de la vie,
Pense et parle toujours de moi autour de toi et tu verras,

Tout ira bien.
Tu sais, je t'entends, je ne suis pas loin, Je suis là, juste de l’autre côté.

Mary Elizabeth Frye

On comprend alors l'importance de la poésie à l'école.

J'ai édité en 2004 un livre de 400 pages, 1 Kg, Pour une école du gai savoir; il m'en reste; 3 auteurs (Philippe Granarolo, philosophe, adjoint à La Garde, Laurent Carle et moi-même); pages 247 à 252, on trouve des textes poétiques de jeunes et les deux dernières pages, 392, 393, sont deux poèmes d'élèves de 6°; le livre s'achève sur cette citation de Flaubert : la civilisation est une histoire contre la poésie;

Les Cahiers de l'Égaré ont édité aussi 5 Printemps des poètes dans les collèges du Var (2000-2004), livres présentant les poèmes obtenus par la BIP, brigade d'intervention poétique, une trentaine de poètes intervenant une journée dans 30 collèges; et puis, ça s'est arrêté; les sous, vous savez, il paraît que des fois, il n'y en a plus et puis, ça s'est arrêté l'année où j'ai été éjecté de la Maison des Comoni; c'était une opération financée par le Conseil Général du Var, à l'initiative de Rémy Durand, détaché et attaché culturel de l'IA du Var et de l'Académie de Nice; je faisais partie de la BIP.        J.C. Grosse

Voici un vieil article d'Evelyne Charmeux sur ce sujet. Il date d'avril 2008. Comme quoi les blogs ont aussi  leur éternité.

La mémoire : quel rapport avec la récitation ? Et avec la poésie ?

 

Georges Jean, immense poète et théoricien de la poésie en classe, disait : "Il faut tuer la récitation pour sauver la poésie". Apparemment, nos dirigeants n'ont pas lu Georges Jean, et n'ont sans doute ni lu, ni écrit beaucoup de poésie... Les nouveaux programmes qui, avec la démagogie qui les anime, réintroduisent ce terme familier (mais non dépourvu de connotations inquiétantes), nous amènent à réfléchir sur la poésie en classe et sur le rôle de la mémoire dans l'éducation de nos petits.



Parlons de poésie d'abord : on en parle si peu aujourd'hui !
Je voudrais commencer par donner la parole à ceux qui, en leur temps, ont dit des choses, bien oubliées aujourd'hui, mais essentielles sur la poésie et l'école. En commençant par rappeler le cri d'alarme poussé par Josette Jolibert, en 1971, à ce propos, sous le titre : "Il faut réconcilier poésie et pédagogie".


Nous sommes tous des sous-développés en poésie, comme lecteurs et comme créateurs . 
Pour combien d’entre nous la poésie est-elle autre chose qu’un “supplément d’âme” occasionnel ? 
Et quelle poésie, 
plus récente que celle de Baudelaire,
et autre que celle qui “veut dire” quelque chose immédiatement ?
Pour combien d’entre nous René Char ou tel autre poète de notre temps sont-ils confrontation quotidienne?
Et combien d’entre nous écrivent ? créent ?
Prenons-en acte sans nous culpabiliser. C’est une situation historiquement datée. Il est facile de situer les responsabilités en posant ces questions :
quelle formation ?
quelle disponibilité ?
quel environnement culturel ?
quand a-t-on sollicité notre créativité
 ?

Quand on lit cela, on ne peut qu'être bouleversés : il y a trente-sept ans que ces choses ont été dites, et qu'y a-t-il eu de changé depuis ?
Pourtant, à cette époque, sous l'impulsion des propositions que Georges Jean avait développées dans le chapitre intitulé : "Poésie et approche de la langue poétique" du Plan de Rénovation de l'enseignement du français à l'Ecole Elémentaire, (dont il faut savoir qu'il devait devenir texte officiel, avec l'accord du ministre de l'époque, mais qui subit le veto absolu de Monsieur Georges Pompidou, nouveau président de la République), les propositions concrètes ne manquaient pas.
je souhaite ici faire connaître à nos collègues, quelques extraits au moins du texte de G. Jean, ne serait-ce que pour pouvoir les comparer à ce que disent les nouveaux programmes.


Il serait tout d'abord préférable de remplacer le terme de « récitation » par celui de « poésie ». 
Non que la mémorisation des textes poétiques soit abandonnée mais parce que la "récitation" — la diction, plutôt — proprement dite 
n'est et ne doit être qu'un moment dans l'activité de poésie qu'il est souhaitable de voir instituer à tous les niveaux de l'enseignement élémentaire. (...)
La poésie est propre à rendre à l'enfance ce que l'enfance lui a donné. Et à susciter chez l'enfant le besoin de dire, enfin, tout ce que l'on a à dire, et à le faire partager. 
La poésie aurait donc à l'école élémentaire la double fonction de «donner à voir» et de provoquer chez l'enfant le désir de rendre conscient l’inexprimable.
il serait bon d'introduire le plus souvent possible au cours de la classe, des lectures de un ou plusieurs poèmes, lectures faites par le maître ou par des enfants, que traverse la poésie.
Chaque semaine, le ou les textes ayant obtenu la plus grande audience ou celui qui plaît tout particulièrement à un enfant ou au maître, 
seraient plus spécialement étudiés en vue de la diction et éventuellement de la mémorisation
Il s'agit d'une imprégnation plus globale qu'analytique et qui concerne aussi bien la sensibilité et l'imaginaire que la conscience claire des formes du discours. On ne cherchera pas à fixer des structures, mais à faciliter pour les enfants qui le désirent 
la constitution d'un « trésor » personnel de poèmes, susceptible de renaître à chaque appel. Cependant on n'oubliera jamais que la poésie est une langue « qui parle et qui se parle » et l'on accordera la plus grande importance à la perception par l'enfant de la respiration, de la prosodie, de l'accentuation, de l’articulation des textes poétiques. Le premier souci de celui qui dit un poème devrait être de faire entendre le poème, sans le trahir. En même temps, il devrait chercher à ne pas effacer l’originalité unique de sa voix. Car il ne s'agit pas de sacrifier la personnalité de chaque enfant à une perfection académique ou faussement expressive. On se gardera même dans ce sens d'imposer de l'extérieur une expression, une intonation qui ne peut provenir que du seul respect du texte. La plus grande difficulté résultant de cette orientation nouvelle concerne sans doute le choix des textes. « Le meilleur choix de poème est celui que l'on fait pour soi » disait Eluard. C'est-à-dire qu'il y a beaucoup à attendre dans ce domaine de la curiosité, de la sensibilité, de la culture des maîtres. Par ailleurs, il n'est pas vain de parler à ce sujet, « d'expériences poétiques », dans la mesure où le maître et les enfants «essaient» les textes les plus divers et retiennent ceux qui semblent convenir aux uns et aux autres, et même s'inscrivent dans certaines circonstances précises.

Je voudrais souligner, dans ce très beau texte, l'immense respect de l'enfant qui l'anime et le sens poétique profond qui s'en dégage.
Aujourd'hui, que trouve-t-on dans le projet de nouveaux programmes ? 
1- Pour l'école maternelle : "Dire ou chanter une dizaine de comptines avec une bonne prononciation".
Il n'est pas précisé ce qu'est une "bonne" prononciation... 
Il est vrai que dès la grande section, il s'agit d'avoir en plus "un ton approprié". On ne précise pas non plus ni à quoi doit être approprié ce ton, ni en quoi il consiste.
2- Au CP et au CE1 : "Dire de mémoire de courts poèmes ou des comptines, en mentionnant le titre et l'auteur, en respectant le rythme et en ménageant des respirations, et sans commettre d'erreurs (sans oublis ou substitutions)". 
Avouez que c'est là une conception délicieusement romantique, et tout à fait propre à éveiller le sens poétique des enfants ! Josette Jolibert doit être rassurée...
3- Quant aux CE2, CM1 et CM2, ils devront "dire sans erreurs et de manière expressive, une dizaine de textes en prose ou de poèmes"
Comme plus haut, on ne précise pas ce qu'est une "manière expressive", mais on peut surtout remarquer que la sanction des erreurs prime de toute évidence le sentiment poétique... On est loin des "moments de poésie" ; on est loin du "trésor" personnel et de la langue "qui parle et qui se parle ", on est très loin de la culture.
Il est donc incontestable que le retour de ce terme de récitation a fait disparaître non seulement le terme de "poésie", mais tout l'esprit de cette "rose inutile et nécessaire" (G. Jean), dont le rôle dans l'éducation est une évidence démontrée depuis toujours. 

Mais il y a plus grave.
Je vois dans l'utilisation de ce terme, — amalgame (encore un) entre 
mémoire et récitation —, une volonté, sans doute parfaitement consciente, de mise au pas des élèves. 
Avez-vous remarqué que toutes les formes d'obscurantisme, religieux ou non, n'enseignent qu'avec de la récitation de textes appris par cœur ? Vous ne vous êtes jamais demandé pourquoi ? 
C'est que, figurez-vous, pendant qu'on récite, on ne pense pas ! La récitation occupe tout le cerveau qui n'a plus besoin même de comprendre ce qu'il débite, et qui se laisse dévorer de l'intérieur par des mots étrangers à lui. 
Rien à voir avec la mémoire, qui est nourriture de la pensée et qui se nourrit elle-même, non point d'apprentissage par cœur, mais de mille, cinq mille lectures. C'est en lisant et en relisant des poèmes chaque jour, avec le texte sous les yeux — parce que la poésie ne souffre pas que l'on ait des trous de mémoire, et parce que le vécu poétique n'a rien à voir avec un contrôle de mémorisation — que la mémoire se nourrit.
Qu'elle soit chose essentielle et qu'il faille la développer, cela va de soi. 
Le problème, c'est que jamais le fait de "réciter" n'a développé la mémoire, ni quoi que ce soit d'autre, du reste. 
Ce qui est essentiel, c'est de 
savoir par cœur des quantités de textes (pas une "dizaine"... !). Et ce n'est pas du tout pour les réciter : Ils servent, ces textes, à fabriquer le miel culturel de chacun, celui qui fait réfléchir, qui structure la pensée et qui équilibre la personne. La mémoire, il faut le répéter, n'existe et ne se développe que par des lectures, encore et toujours recommencées. 
Est-il certain qu'une méthode syllabique d'enseignement d'icelle prépare bien à cela ? 

 

Commentaires de Christian Montelle

Pour inspirer l'amour et non la haine des poèmes, le récital de poésie commence à être connu : il marche vraiment très bien. De nombreux collègues peuvent en témoigner.
Le récital de poésie
Bon ! la récitation ennuie à mourir beaucoup d’élèves, même si elle en réjouit d’autres. Comment la rendre attractive ? Imaginez-vous (souvenir…) en train de dire un poème devant des camarades qui ne vous écoutent pas, puisque tous connaissent déjà le texte par cœur, et à l’intention d’un professeur qui ne guette que vos oublis ; vous voilà donc en train de réciter un poème que vous n’aimez pas forcément et que vous avez plus ou moins compris. Cette perspective vous plonge-t-elle dans l’allégresse ou dans la morne acceptation d’une corvée inévitable ? Ne peut-on imaginer de donner vie de façon plus jubilatoire aux beaux poèmes de notre patrimoine ? Je veux en présenter une, parmi tant d’autres, et qui plaît beaucoup aux élèves : le récital. Avec mes élèves nous avons constitué au fil des ans des fichiers de poésie, un pour les 6e/5e et un autre pour les 4e/3e. Nous approchons des trois cents poèmes dans chaque fichier : que des beaux, des bons, des gouleyants, des signifiants, des qui nous plaisent (le maître participe au choix), en toute subjectivité. Fiches au format B5, poèmes collés proprement, et comprenant au verso une notice sur l’auteur.

Le travail sur la voix, évoqué plus haut, a été effectué, des poèmes étant lus par le professeur ou les élèves comme exemples. Le récital est annoncé avec quinze jours d’avance (ou un mois…). Des paquets de fiches sont distribués à chaque élève. Lecture silencieuse, choix du poème que chacun va « offrir » à la classe (ou à un auditoire plus large).
Le jour du récital arrive, réservé à la classe aujourd’hui. Consignes : après la musique de début (une musique qui reviendra de temps en temps lors des silences, une musique douce, un peu envoûtante : Suite pour violoncelle de Bach, par exemple), seule la poésie aura la parole. Aucun commentaire d’élève ou de professeur, mais tout le monde, y compris le professeur, pourra dire, lire, chanter, crier, psalmodier — en un mot donner voix — à un ou plusieurs poèmes, du lieu de la classe qu’il choisira, de la façon qui lui semblera convaincante. Le récitant doit articuler, prendre son temps, car les autres ne connaissent pas son poème ; il leur offre, d’amitié, le texte qui l’a conquis lui-même. L’écoute est maximale, le silence d’une densité incroyable. Il faut avoir vécu une de ces séances pour savoir l’émotion que peut engendrer un poème dit, vraiment dit, quand le silence est un berceau dans lequel la parole prend une vie nouvelle. La musique clora doucement la séance et permettra de revenir dans le monde de la classe où, toutefois, aucun jugement ne sera porté, aucune note ne sera donnée. En effet, cette prestation est tellement personnelle et authentique que ce serait juger la personne de façon terrible que d’ajouter quelque chose à la voix entendue. Ces récitals plaisent tellement aux enfants qu’ils sont une récompense : Monsieur, s’il vous plaît, on prépare un récital de poèmes ? Je ne rêve pas : essayez !
Bien sûr, un récital peut être donné à une autre classe qui rendra la pareille, à des parents lors d’une fête, mais cela est secondaire. Le premier objectif visé est l’émotion partagée qui fonde la classe, pas la représentation qui place le poème au second plan.

Une variante peut être amenée, en fin d’année, lorsque la diction est bien maîtrisée : c’est l’enregistrement au caméscope. Il est recommandé d’utiliser un micro de proximité de bonne qualité pour garder toute l’émotion contenue dans les voix. Une caméra qui fait des gros plans, qui tourne autour du récitant, qui glisse sur le public, voilà de bons exercices, assez faciles, pour mettre en pratique les études sur l’image. La cassette/CD/DVD audio ou vidéo pourra être dupliquée pour les familles, passée sur le circuit interne ou la radio du collège, proposée à quelque cyberjournal : offrir un poème à un enfant du bout du monde !
Extrait de :Christian Montelle, La parole contre l'échec scolaire, l'Harmattan, 2005

 

Christian Montelle

Chère Eveline,
Vous écrivez :
"Ce qui est essentiel, c'est de savoir par cœur des quantités de textes (pas une "dizaine"... !). Et ce n'est pas du tout pour les réciter : Ils servent, ces textes, à fabriquer le miel culturel de chacun, celui qui fait réfléchir, qui structure la pensée et qui équilibre la personne. La mémoire, il faut le répéter, n'existe et ne se développe que par des lectures, encore et toujours recommencées. "
En tout cas, je pense que le poème n'existe pas tant qu'il ne s'est pas envolé dans la parole. Le poème fait plus souvent ressentir que réfléchir. Ressentir par le fait qu'il ouvre de façon différente nos yeux sur le monde.
Le poème est aussi musique et, comme une partition, il a besoin d'être interprété. Quel plaisir peut-on éprouver à lire une partition bouche fermée ?
Chacun interprète le poème de façon différente et c'est un formidable plaisir de partager cette diversité qui enrichit chaque auditeur.
On peut lire, réciter, psalmodier, chanter les poèmes. Qu'importe si on leur donne des ailes ! Les ailes du désir. Les ailes du plaisir. Les ailes du partage.
Revenir à la récitation ancienne n'a pas tout à fait ces objectifs ! La récitation-corvée tuera encore un peu plus la poésie !



 

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Le Chercheur/Lars Muhl/Flammarion

16 Février 2017 , Rédigé par grossel Publié dans #développement personnel, #J.C.G., #note de lecture

présentation du livre par l'éditeur

présentation du livre par l'éditeur

Le Chercheur

Lars Muhl

Flammarion 2017

C'est sur proposition de Flammarion que je me suis retrouvé lecteur en avant-première de ce 1° tome d'une trilogie de Lars Muhl, O manuscript, comprenant The Seer, The Magdalene, The Grail.

The Seer, Le Voyant, Le Chercheur a été publié en 2012.

Traduit pour la 1° fois en français, Le Chercheur, est le récit d'une série de rencontres initiatiques entre le narrateur et le Voyant. Ayant de lui-même renoncé à une carrière de musicien, ayant renoncé à la plupart des illusions auxquelles aspirent la plupart des gens, réussite, reconnaissance, argent, pouvoir, vivant solitaire et de peu, le narrateur semble avoir atteint le fond car il n'a pas encore pleine conscience de la fausseté des artifices et paillettes qui attirent la plupart.

Il entreprend un voyage en train depuis Copenhague jusqu'en Espagne, voyage décrit en plusieurs épisodes, alternant avec le récit des rencontres, des expériences et leçons données par le Voyant. Entre chaque épisode de ce voyage, des rencontres ou plutôt dans un premier temps, des réponses à des invitations.

Il se rend là où un mystérieux interlocuteur l'invite à se rendre, révélant ainsi une disponibilité propice à l'initiation. Il en a déjà fini avec d'innombrables freins et liens, avec d'innombrables peurs. C'est au pied de Monségur que le mystérieux personnage, le Voyant, va se montrer, lui faisant vivre des montées ardues et des rencontres annoncées.

En grimpant cette montagne réelle, il va découvrir ce pour quoi il est destiné, ce qu'il désire vraiment qui consiste à « être présent en tant qu'être humain », sacrée montagne, autrement plus ardue que celle de Monségur.

L'initiation passe par des expériences, celle du sac à dos que le Voyant charge de pierres réelles, métaphores ou symboles de poids psychiques dont il doit se libérer, se soulager.

Le Voyant a des « pouvoirs » extraordinaires mais prenons le mot « pouvoir » avec précaution puisque ce mot est récusé par le Voyant. Pour un lecteur n'ayant pas été initié, cela ressemble à des pouvoirs. En réalité, c'est parce qu'il se hisse à une conscience nouvelle, plus globale que les niveaux de conscience acquis et transmis, parce qu'il réussit à se rendre isogyne, seulement et pleinement humain, non-déterminé par le genre, non-personnalité, disponible sans limites qu'il est capable de modifier, de transformer l'état de celui qui fait appel à lui, en dernier recours, pour le guérir de sa maladie ou le sortir de son état moribond car il est d'abord malade, il se meurt de ses pensées nocives. Ce sont nos poisons qui nous empoisonnent. Et c'est parce qu'il est en harmonie avec l'univers, qu'il est synchrone avec le flux de la Vie qu'il peut aider l'autre, induire en lui cette harmonie. Il est responsable de cet autre qui se livre à lui. Et peut donc répondre concrètement à la question que puis-je faire pour lui ?

La question de Hamlet, être ou ne pas être, doit retrouver toute sa force de questionnement. Pour être, il faut savoir ce qu'on n'est pas, se purifier, se raffiner, se rendre invisible, gagner en élégance et en humour, (l'humour doit être désarmant et donc me désarmer, surtout quand je me heurte à un obstacle, à un échec ; de lourd, le rendre léger), développer attention et concentration, remplacer l'instinct par l'intuition, devenir un véritable artiste c'est-à-dire être à l'écoute de l'harmonie universelle, en harmonie avec les lois universelles, devenir un danseur cosmique. Ce qu'est sans doute la Dona, la gitane croisée à Malaga dont l'élégance naturelle (elle est l'élégance) éclipse toutes les beautés artificielles qui cherchent à se mettre en valeur sur la Promenade.

De Vinci est décrit comme un ambassadeur de visions, transformant ce qu'il recevait dans un esprit identique à celui contenu dans ce qu'il recevait. L'artiste a pour mission de transformer ce qu'il a reçu avec sa conscience qu'il s'est exercé à aiguiser, à rendre extrêmement sensible, venu de l'humain et du cosmique. Et de lui proposer l'exercice de visualisation de la flamme d'une bougie. Deux sortes de lumières sont évoquées, la lumière bleu gaz qui renvoie à toutes les énergies physiques, la lumière dorée qui renvoie à l'énergie spirituelle.

Pour quelqu'un qui est en recherche spirituelle, ce récit est nourricier. Nombre de leçons, de formules sont audibles, parlantes, incitatives à un travail de dépouillement. Évidemment, on sent des influences venues de l'étude de nombreux textes des traditions et de la mystique. Assez peu de considérations de nature scientifique. Quand cela se produit, ça ne m'a pas semblé convaincant, par exemple les 24 énergies présentes dans une pièce et représentant les mésusages antérieurs de « son » pouvoir par le Voyant.

Pour conclure, ce récit d'initiation n'est pas austère. Le narrateur comme le Voyant sont aussi de bons vivants, aimant bons plats, bons vins, aimant se promener, profiter des lieux comme des gens.

Lars Muhl est entré en 2013 dans la liste Watkins des guides spirituels, le Dalaï Lama en 1° position, Deepak Chopra en 4°, Lars Muhl en 90°. Paulo Coelho est 7°, Jodorowsky, 27°, Benoît XVI, 33°, Rupert Sheldrake, 87°. Aucun des "maîtres" français: Matthieu Ricard, Frédéric Lenoir, Laurent Gounelle, Christophe André, Alexandre Jollien, Jacques Salomé. Bizarre cette liste anglo-saxonne.

On trouve sur you tube des vidéos, hélas aucune en français. Ce livre édité par Flammarion vient donc à propos.

 

Jean-Claude Grosse

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Naître enchantés/Magali Dieux

11 Septembre 2016 , Rédigé par grossel Publié dans #agora, #J.C.G.

Le samedi 10 septembre 2016, de 10 H à 13 H, à la médiathèque d'Hyères, les petits déjeuners de la médiathèque organisés par Les Colibris du Revest-Ollioules et Les 4 Saisons d'ailleurs ont accueilli Magali Dieux pour la projection du film Naître enchantés, suivie d'un débat qui a largement débordé puisque la séance s'est terminée à 13 H

Si j'écris cet article, c'est parce que ce film, en DVD, qui accompagne le livre est particulièrement émouvant et prenant

et que la capacité à transcender et à transmettre l'expérience vécue par Magali Dieux, un enfantement dans une voiture avec une petite fille de 6 ans comme témoin, est stupéfiante. De ce qui aurait pu être un traumatisme, Magali Dieux a fait une méthode où la vibration, l'état d'esprit et du corps: être ouverte, dans le sourire et la joie, sont au coeur de l'enfantement, le mot est important, enfanter, pas accoucher. Avec 5 enfantements oeuvrés car c'est faire oeuvre qu'enfanter ainsi, dont un enfant mort avant terme, Magali Dieux sait ce qu'elle a vécu et ce qu'elle transmet et partage.

J'ai connu Magali, lycéenne, fréquentant l'atelier théâtre du centre culturel L'Escaillon à Toulon, je l'ai vue devenir comédienne, auteur, metteur en scène, j'ai accueilli deux de ses spectacles aux Comoni au Revest: Mignonne, allons voir et Zap ta tête et prends le nord. Elle fut du 1° spectacle du Revest en juilllet 1983, Le gardien de musée par une compagnie belge. Je l'ai suivie quand elle a perdu par mort subite du nourrisson un de ses enfants et qu'elle a réagi immédiatement par une nouvelle grossesse.

La retrouver un soir de Noël, à la Mahakali, à Châteauvallon, il y a 2 ou 3 ans, fut un grand plaisir et c'est ainsi que j'ai découvert et le livre et le film et retrouver la femme, épanouie, chaleureuse qu'elle est devenue, coach en développement personnel, après avoir été coach de chant pour The Voïce.

Il me semble que cette façon d'enfanter où les parents se réapproprient l'événement est d'une humanité, d'une bientraitance, d'une bienveillance qui méritent d'être connues, diffusées. Je pense aussi que cette capacité de transcender un événement fortuit avec sérénité, maîtrise est exemplaire. Chacun est sans doute porteur un jour ou l'autre d'un événement qui peut être transmis. L'attitude de Magali qui est une philosophie de la vie, ouverture du corps en lien avec l'ouverture d'esprit, l'accueil de la vague comme il est dit dans le film à un moment, est bien sûr une attitude, une philosophie qui vaut pour tout instant de la vie et jusqu'à la fin de vie.

Merci à Magali Dieux d'être devenue ce qu'elle est devenue.

Naître enchantés est aujourd'hui un collectif de médecins, sages-femmes et artistes qui ont mis en place le Label Naître enchantés pour toutes les maternités ayant à coeur d'humaniser les techniques de soins et la mise au monde de l'être humain de demain.

Dernier point: voilà avec Naître enchantés, un thème d'écriture pour femmes et hommes peu exploré me semble-t-il (ce n'est pas le cas des fins de vie). Des écritures enchantées nous changeraient des écritures dites du réel, écritures sur le bruit du monde dont on se lasse tant ce monde est violent et le restera, indifférent aux écritures qui le dénoncent. Quel auteur, quelle autrice des EAT (Écrivains associés du théâtre) lancera un projet pluriel sur ce thème. La vidéo de l'enfantement de Zoé par Magali est un support extraordinaire.

Présentation du livre:

Jamais les femmes françaises n’ont été aussi bien assistées médicalement qu’aujourd’hui pour mettre au monde leur enfant. Comment expliquer alors le nombre grandissant d’accouchements pathologiques ? Pendant que Patrice Van Eersel, journaliste, enquête sur le sens de la naissance dans notre société, Benoît Le Goëdec, sage-femme, explique clairement qu’une naissance ne peut être simplement confiée à un contexte médical, lequel, potentiellement, dépossède et dépersonnalise. Et c’est là qu’intervient Magali Dieux qui découvre avec ses cinq accouchements qu’une vibration spécifique émise en pleine conscience pendant les contractions fait traverser les douleurs psychiques et physiques de l’accouchement. Pendant dix ans, elle développe sa philosophie, affine sa méthode “Naître enchantés par l’expression vocale ajustée”, devient professeur de chant et thérapeute, à la rencontre des scientifiques et des hôpitaux. Sa méthode donne aux femmes et aux couples qui le désirent la possibilité de rester acteurs de leur accouchement, en lien avec l’équipe médicale et leur enfant, quelles que soient les conditions techniques (déclenchement, péridurale, césarienne, etc.). Dans cet ouvrage, Magali Dieux propose une préparation du couple à la naissance et à la parentalité pour accompagner l’arrivée de son enfant dans la joie.

le livre, Naître enchantés; l'affiche du petit déjeuner du 10 septembre 2016
le livre, Naître enchantés; l'affiche du petit déjeuner du 10 septembre 2016

le livre, Naître enchantés; l'affiche du petit déjeuner du 10 septembre 2016

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Note sur le vote / la grève des électeurs

3 Mars 2015 , Rédigé par grossel Publié dans #agora, #FINS DE PARTIES, #agoras, #note de lecture, #pour toujours, #écriture- lecture

Note sur le vote / la grève des électeurs

Face à la montée de l'abstention, de la défiance envers les élus, du populisme : la démocratie est-elle en danger ? Comment remobiliser le citoyen dans ses devoirs ?

En effet de plus en plus de citoyens ne se "dérangent " plus pour voter.

Pourquoi ? Certainement à cause d'un ensemble de faits. Mais Il semble, entre autre, que plus personne ne soit dupe de la mascarade que représentent les élections :

1- les candidats avancent des promesses irréalisables. Une fois au pouvoir tout le monde sait qu'ils ne pourront pas les tenir parce qu'en fait le pouvoir ne se tient pas là . La guerre est économique, et ce sont les multinationales ou les banques qui tiennent les rennes.

2- la crise de 2008 a confirmer la subordination des Etats aux banques et au système financier dans son ensemble.

Pour sauver le système financier les Etats ont contracté une dette énorme, qui se payent aujourd'hui par des politiques d'austérité.

La priorité après cette crise majeure était de séparer les banques d'investissements des banques spéculatives. A ce jour, rien ou presque n'a été fait et le monde entier reste un énorme casino (cf Patick VIVERET- philosophe, conseiller à la Cour des Comptes). Ca passe ou ca casse !

3- au delà de la crise financière, le monde doit faire face à une crise sociale et écologique majeure. Le discours des politiques sur une croissance illimitée qui devrait tout résoudre n'est plus crédible. On ne peut pas croître indéfiniment avec des ressources limitées et en payant le prix fort de la destruction massive de la planète qui nous héberge.

4- les citoyens aspirent à un changement de paradigme, qu'aucun politique n'incarne à leurs yeux. Mettre l'économie au service de l'homme et non l'homme au service de l'économie.

Ils préfèrent donc l'action directe et citoyenne : ZAD, pétitions internet, ...etc. L'économie sociale et solidaire (ESS) progresse et se base sur la collaboration, l'échange, la solidarité, le partage.

Mais elle n'est pas encore enseignée à l'ENA, ce qui renforce le fossé entre "élite" de la Nation et citoyen...

Ainsi donc le citoyen place de plus en plus (et surtout les jeunes) ses urgences, ses moyens d'action et ses "devoirs" à un autre niveau, dans une autre sphère d'action.

Le vote traditionnel , sans aucune consultation, sans aucun contrôle possible entre deux échéances électorales, est périmé !

La démocratie doit se vivre à 2 niveaux :

- sur un plan local pour tout ce qui régie le quotidien, organisé en Pôles de développement autonomes et à hiérarchie horizontale

- sur un plan mondial pour toutes les questions de sécurité et de protection de la planète (cf Les sommets de La Terre)

La remobilisation des citoyens passe donc par une révolution des mentalités et une révolution de l'organisation du vivre ensemble

le 25 février 2015

michelle Lissillour

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La cause humaine/Du bon usage de la fin d'un monde/Patrick Viveret

9 Juillet 2014 , Rédigé par grossel Publié dans #agora

La cause humaine

Vivre à la bonne heure

Patrick Viveret

Du bon usage de la fin d'un monde

Il y a des livres qui désespèrent. Il y en d'autres qui tentent d'ouvrir des voies. Comment suis-je passé de livres désespérants à deux livres optimistes ? D'autres avaient précédé tout de même, de Stéphane Hessel, Edgar Morin par exemple. Et via les réseaux sociaux, une sensibilisation à des mouvements, actions.

Pour parler des deux livres de Patrick Viveret, je ne m'attarderai pas sur le constat. Nous sommes à la fin d'un monde qui ne le sait pas encore vraiment ou ne veut pas le savoir. Les capitalistes ont gagné la lutte des classes disent-ils. Tant pis pour eux s'ils y croient. Ils ne renonceront pas d'eux-mêmes à leur logiciel mental, fait de démesure. Euphorie et panique les animent. Ils mettent en coupe réglée planète et gens et tant pis pour les dégâts et catastrophes. Les gens ordinaires ont un logiciel d'une étonnante fixité. Il n'y a qu'à voir les résultats électoraux. Certes, il y a des flux, des votes communistes vers les votes FN, des votes extrême-gauche vers front de gauche. Mais il faut que les partis au pouvoir exacerbent les tensions par leur soumission au capital pour que ces flux se manifestent. Ça demande des décennies. Bref, il est clair que les élections comme soi-disant moyen d'exercer la démocratie sont un outil anti-démocratique et il faudra bien l'admettre. L'abstention n'est pas prise en compte alors que c'est le parti majoritaire. Il faudra revenir aux Grecs ou inventer de nouvelles façons de contrôler le pouvoir et les banques, principal moyen de la soumission. Les multi-nationales sont également à contrôler, leur pouvoir de nuisance est considérable ne serait-ce que par le lobbying, la publicité mensongère, la lutte sans merci pour cadenasser la démocratie. Il y a tout de même des logiciels qui changent, des gens qui agissent, réfléchissent, partagent.

Patrick Viveret montre que ces forces sont à l'oeuvre avec des logiciels autres. Deux trépieds, l'ABS et le REV. L'ABS c'est le logiciel des sentiments moteurs positifs pour changer, sortir par le haut des mécanismes mortifères à l'oeuvre. L'Amour, de soi, d'autrui, de la nature, de la beauté, de l'art. Le Bonheur, la recherche active du bonheur, pas un état statique de repos, une activité permanente faite de curiosité, de découverte, d'invention, de partage. Le Sens, la recherche de sens est essentielle pour le changement de logiciel. Amour et bonheur sont partiellement au service du sens, tout en donnant du plaisir. On combat mieux si on n'est plus dans une logique guerrière, si on en tire des bénéfices de type qualitatif, si de la valeur s'ajoute, si des valeurs communes sont discutées, partagées, si on se demande que voulons-nous faire de notre vie et pas seulement dans notre vie, sachant aussi que nous sommes mortels et que cet horizon donne si on sait le méditer, de la valeur à la vie, du goût à celle-ci, donne l'envie du bien-vivre.

Je me propose plutôt que de commenter de faire un inventaire de solutions.


1 - La mesure des richesses. Quoi intégrer dans le PIB ? Les profits de la prostitution, de la drogue, des trafics divers comme le propose l'Europe aux états membres ? Les flux liés à la publicité (1200 milliards de dollars), aux ventes d'armes (1600 milliards de dollars) ? 10 % des sommes qui circulent pour la drogue, les armes, la publicité (l'économie du mal-être) suffiraient à satisfaire les besoins vitaux non satisfaits de l'humanité. Ou faut-il intégrer de vraies richesses pas nécessairement sources de flux monétaires comme le travail des femmes au foyer, le travail des bénévoles d'associations... ? Il faut que devienne publique la question : qu'est-ce qui compte vraiment pour nous ? Qu'est-ce qui doit être pris en compte ?

Pour que ce genre de questions soient prises en compte, il faut élargir la démocratie, il faut que cela entre dans le débat public et citoyen, que ce ne soit pas l'apanage des experts et technocrates de l'Europe et de l'INSEE. Voir ce qui s'est passé au Boutan avec la création du BNB, Bonheur National Brut, excellent documentaire de Marie-Monique Robin

2 - La création de monnaies locales dont un des principes est qu'une monnaie locale perd de la valeur si elle n'est pas utilisée ce qui interdit l'accumulation, la thésaurisation.

Les monnaies locales complémentaires dans le monde d'aujourd'jui

En 2014, plus de 2.500 systèmes de monnaie locale sont utilisés à travers le monde.

L'un des plus en vue est le LETS (Local Exchange Trading System), un réseau d'échange supporté par sa propre monnaie interne. Démarré à l'origine à Vancouver, au Canada, plus de 30 systèmes LETS sont aujourd'hui actifs au Canada et 400 autres dans le monde.

En Angleterre, la ville de Lewes, capitale de l'East Sussex, fut une des premières en 2008 à battre sa propre monnaie. Ses quelque 16.000 habitants peuvent l'utiliser dans les commerces locaux.Plus de soixante-dix sociétés ou magasins acceptent cette devise, valant autant que la livre sterling. D'autres petites villes ont suivi, avec une certaine réussite : Stroud, Totnes, Brixton, etc. A plus grande échelle, Bristol, un ville de 400.000 habitants encourage depuis 2012 l'usage de la livre de Bristol ("Bristol pound"). L'investissement de la ville est très faible (5000£) mais son effet de levier est déterminant. Selon Guy Poultney, conseiller municipal à la vie communautaire à Bristol, "dans un contexte économique difficile, les habitants sont incités à acheter local... Cela encourage également la diversification de l’économie locale pour aider à la création d’emplois de qualité. Nous avons atteint des millions de personnes. Il est important de souligner une accélération de la consommation puisque cet argent est fait pour être être dépensé et non économisé, stimulant ainsi le secteur indépendant. Il y a sept espaces d’échange répartis dans la ville. Les gens peuvent aussi simplement recevoir des Bristol pounds lorsqu’on leur rend la monnaie. Nous avons également commencé à faire la promotion du Bristol pound sur les salaires. À noter que vous pouvez payer un autre membre du réseau en ligne ou via un simple texto. Le réseau du Bristol pound est très large afin d’inclure toute entreprise indépendante locale. Nous nous réservons cependant le droit de refuser un membre si nous estimons que son activité sape la réputation et le fonctionnement du projet."

En Allemagne le Chiemgauer créé à Prien am Chiemsee en 2003, similaire au LETS anglais, a fait tâche d’huile en Bavière et prend une dimension de monnaie d’échange régionale. D’autres monnaies complémentaires ont également vues le jour comme le Berliner, ou les Tauschringe plus ou moins specialisés sur un type de troc ou de produits.

Partout dans le monde le système se développe : l'Italie, le Brésil, le Japon, les Etats-Unis, le Mexique, le Sénégal,la Lettonie, pour ne citer qu'eux, ont des expériences en cours de monnaies locales.

En France , de nombreuses initiatives de monnaies locales ont été lancées depuis 2010. Parmi ells on peut citer le SEL (Système d'échange local) l’équivalent diu LETS anglais ou encore le projet SOL avec sa monnaie “solidaire dématérialisée” . A Toulouse le Sol-Violette, est une "monnaie de territoire, un outil de cohésion sociale, un vecteur de création de richesses mais également d'emplois, un instrument d'échange au service du Bien ". De fait la mairie de Toulouse distribue une petite partie des prestations sociales en Sol Violette. Comme le Chiemgauer en Allemagne, le Sol Violette de Toulouse, est une monnaie fondante. Elle perde peu à peu de leur valeur au fil des mois ce qui incite à l'utiliser et à faire tourner l'économie locale. Au total une vingtaine de monnaies locales ont été crée en France : l’eusko en pays basque, le MIEL (Monnaie d'Intérêt Economique Local) à Libourne, le Bou’Sol à Boulogne sur mer, l’Elef à Chambéry, etc. Dans l'Hérault, les commerçants de Pézenas ont lancé l'Occitan, une monnaie alternative, moyen de paiement légal au même titre que les chèques déjeuners.

3 – Le revenu universel de base

http://www.dailymotion.com/video/x18ij09_le-revenu-de-base-un-nouveau-droit-humain_news

4 – une nouvelle donne démocratique, à commencer par une nouvelle constitution écrite par les citoyens et non par les partis et visant le contrôle des politiques et politiciens

https://www.youtube.com/watch?v=zjq4y6115sg&feature=youtu.be

5 – la bataille des semences qu'il faut gagner contre Monsanto par exemple ;

kokopelli mène un combat à soutenir

de même qu'il faut soutenir les initiatives de Pierre Rabhi, Semons des graines, créons l'abondance, Les incroyables comestibles; excellent documentaire en DVD de Marie-Monique Robin, Le monde selon Monsanto

6 – la bataille pour l'autosuffisance alimentaire, les circuits courts, les jardins partagés, les AMAP, une agriculture savante c'est-à-dire éminemment écologique; voir l'excellent documentaire de Marie-Monique Robin sur Les moissons du futur

7 – les changements dans les habitudes de transport, les habitudes alimentaires, vestimentaires, dans l'aménagement urbain, dans l'habitat

les habitats verticaux

http://www.village-vertical.org/

http://www.lexpress.fr/region/aquitaine/begles-invente-le-lotissement-vertical-modulable_1264436.html

8 – la bataille pour l'autosuffisance énergétique, la réduction par chacun de son empreinte carbone

aller à 25 minutes de ce JT de France 2

http://www.francetvinfo.fr/replay-jt/france-2/20-heures/jt-de-20h-du-lundi-7-juillet-2014_636065.html

les incroyables comestibles

https://www.facebook.com/lesincroyablescomestiblesmenetousalon?fref=ts

c'était un peu ce que la liste Avec vous maintenant voulait pour Le Revest en 2008 avec le village éco-citoyen, non ?

http://avecvousmaintenant.free.fr/IMG/pdf/projet_avm_vers4.pdf

on n'avait peut-être pas trouvé la bonne communication

autres liens

le mouvement des colibris,

http://www.colibris-lemouvement.org/

semons des graines, créons l'abondance

https://www.facebook.com/SemonsDesGrainesCreonsLabondance?fref=ts

les moissons du futur

et quantité d'autres initiatives

la guerre des graines :

http://blog.francetvinfo.fr/guerre-des-graines

barometredudeveloppementdurable.org

Terre de liens

Pierre Rabhi, la sobriété heureuse, au nom de la terre

https://www.facebook.com/pages/Pierre-Rabhi/148621088294?fref=ts

Patrick Viveret, les dialogues en humanité

https://www.facebook.com/patrick.viveret?fref=ts

les campagnes à la ville

bien sûr il faut une école nouvelle qui s'appuie sur l'initiative des jeunes

je me dis des fois que nous gaspillons une partie de notre énergie à des choses nécessaires et futiles (gagner sa vie, c'est-à-dire la perdre) qui ne nous enthousiasment guère

alors que du changement durable est possible à hauteur d'homme, à proximité, qui donne du bonheur

Jean-Claude Grosse

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Welcome to New York, une bonne critique

8 Juin 2014 , Rédigé par grossel Publié dans #J.C.G.

Welcome to New York

Abel Ferrara

J'ai vu ce film il y a déjà quelques jours. Pourquoi ai-je voulu le voir ? Pour me faire mon idée sur cet objet. La polémique entre les producteurs-créateurs-acteurs de la fiction et les protagonistes de la réalité, les critiques très négatives sur le film, cela m'incitait à le regarder. Je n'aime pas trop qu'on me dicte mon jugement.

Mais aussi ce n'est qu'un film et j'aurais pu me dispenser de le regarder. Après tout, j'ai des urgences de pensée plus centrées sur mes désirs du moment, par exemple sur les évidences du temps. Si donc je l'ai regardé, c'est qu'il excitait ma curiosité. Elle n'a pas été déçue. Je pense, contrairement à la réception dominante qu'on a affaire à un film qui restera, (voir une critique sur agoravox, en bas de page) pas du tout un navet, un objet obscène, injurieux. La construction est faussement chronologique, il y a des flash-backs, un monologue intérieur comme un examen lucide sur soi à un moment, un retour en arrière quoi.

Les dialogues, considérés comme indigents, m'ont accroché par leur sècheresse, leur tranchant, leur crudité. On ne tourne pas autour du pot, on est dans le ressenti, pas dans la pensée. On s'affronte à vif, à cru, c'est dur, diffamatoire a-t-on dit.

Les scènes de sexe m'ont paru rabelaisiennes, pas toutes bien sûr, celles du début, joyeuses et pas tristes comme on a dit (la chair est triste, hélas, Mallarmé). Cette manière de prendre de la distance tout en ahanant comme une bête sur une croupe, dans un vagin, en tapotant fesses et seins m'a fait rire. L'acteur dit ne pas aimer l'homme qui prend du plaisir en 6 minutes. En action, l'acteur se moque de son personnage Devereaux. Il baise et rit au fond de lui de ce qu'il nous donne à voir. C'est de la baise caricaturée. Pas évident comme exercice. Mais pour moi, ça a fonctionné. Je ne risque pas de devenir un adepte de ces lècheries de chantilly sur corps de femmes-objets. Les deux flash-backs concernent deux épisodes de séduction car Devereaux-Depardieu est formidablement séducteur. La première séduction se déroule jusqu'à conclusion ; c'est une réussite, une belle histoire d'un moment. La seconde vire à l'agression ratée sur une journaliste. Scène violente. Un même homme, une addiction, des comportements qui changent en fonction de ce qui se présente, en fonction partiellement du consentement ou de la résistance de l'autre. Et il y a la scène de la chambre d'hôtel. Scène violente, assez peu explicite. Que fait Devereaux ? Oblige-t-il l'employée à une fellation ? Il dira qu'il s'est masturbé à hauteur de sa bouche. Il expose sa philosophie de la sexualité au restaurant, à sa fille et à celui qui prétend à elle. La bouillabaisse est une partouze de poissons. Ce n'est pas un crime d'aimer la multiplicité des rencontres et des rapports, peu regardant sur les moyens, étant donné son pouvoir, à la fois de séducteur et d'homme puissant. Comme c'est la dénonciation de l'employée qui conduit à la chute du puissant, les scènes d'explication entre l'épouse, Simone et le coupable sont importantes. Simone est une femme éprise, elle a le sens de la dignité. Elle veut savoir, n'obtient pas ce qu'elle veut, la vérité, met tout de même en œuvre sa fortune pour sortir son mari des griffes de la police et de la justice américaines. Dans ces scènes aux répliques improvisées semble-t-il, ce qui est significatif, on est sensible à leur maladresse, ça va plus loin que ce qu'on veut dire, on blesse, on se blesse, on veut se rapprocher, on se refuse, on fait le point sur les ambitions respectives, la première dame, le futur président. Une évidence, l'homme puissant ne veut pas devenir président, l'homme puissant ne veut pas être sauvé de son addiction. Tant devant le psychiatre qu'avec les journalistes, il est clair, il ne regrette rien, il ne veut pas changer, il veut seulement sortir des griffes américaines et réclame l'aide de Simone, même s'il déteste d'où vient son argent.

La partie concernant l'arrestation, les conditions de détention, le procès, l'abandon des poursuites est traitée rapidement sauf les séquences de la fouille au corps et de la cellule. J'ai trouvé la fouille au corps forte, on est du côté du détenu, l'empathie est forte à ce moment-là et assez souvent dans le film. Le puissant déchu n'est pas malmené par le cinéaste qui ne s'acharne pas sur lui. La preuve en est donnée à la fin avec un personnage ne disant rien après son monologue et nous regardant dans les yeux. Si vous voulez me juger, je vous mets au défi d'essayer. Cette fin est ouverte. Cela me renvoie à l'interview du début où c'est l'acteur Depardieu qui est interviewé, qui ne nomme pas le personnage réel référent. Il nous dit haïr les hommes politiques, ne pas vouloir jouer, il ressent et en même temps rit intérieurement de ce qu'il fait alors même qu'il nous émeut, nous fait rire ou pleurer.

Cette interview met en abyme le film, complexifie sa réception. Ce n'est pas comme le dit le bandeau introductif, à la fois un film s'appuyant sur des choses vues par tout le monde suite à l'énorme médiatisation de l'affaire et une fiction sur en particulier les scènes dans le loft à 60000 dollars par mois. C'est un film sur des corps d'acteurs se saisissant à leur façon de leurs personnages (un Gérard Depardieu, géant, une Jacqueline Bisset, dérangeante), dans une situation de grande crise sous le regard du monde entier, c'est le film d'un réalisateur qui semble comme son acteur renoncer à la maîtrise, qui ne peaufine pas ses scènes, ses dialogues, son montage, ses cuts, un réalisateur qui se moque de sa filmographie, de ses films-culte, un réalisateur de sa chute accompagnant la chute d'un puissant et celle d'un acteur à un moment critique de sa carrière immense.

En clair, ce film restera et deviendra un film-culte par ce qui semble être ses défauts, insuffisances, maladresses, provocations (allez tous vous faire enculer, droit dans nos yeux), énormités, outrances.

Jean-Claude Grosse

remarque en date du 31 décembre 2023 : ce film, jamais sorti en salle, visible seulement en VOD, ne deviendra jamais un film culte, l'affaire Depardieu, déclenchée le 7 décembre 2023 par Complément d'enquête provoquant la chute de l'ogre

je ne corrige en rien ma note du 8 juin 2014 : elle me permet d'évaluer le chemin que j'ai fait, celui qu'il me reste à faire. Je sais ce que je n'ai jamais voulu dans mes histoires d'amour (avec désir préalable). Je sais aussi que je suis peut-être trop facilement empathique avec le pire. Parce que je sais que potentiellement, nous sommes tout, d'innocent à monstre selon deux titres de livres de Depardieu.

Welcome to New York, une bonne critique
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L'État et les banques, les dessous d'un hold up historique

26 Septembre 2012 , Rédigé par grossel Publié dans #agora

L'État et les banques,

les dessous d'un hold-up historique

par Myret Zaki et Etienne Chouard

 

N'est-il pas évident que ces joueurs cyniques que sont devenus les banquiers méritent que leurs pratiques soient jugées d'où la nécessité d'une commission Pecora ayant pouvoir pour poursuivre judiciarement ?

N'est-il pas évident qu'il faille annuler toute la dette liée à ces pratiques, la dette honteuse liée aux pratiques d'usuriers des banquiers ?

N'est-il pas évident qu'il faille séparer banques d'affaires et banques de dépôts ?

N'est-il pas évident que l'État doit retrouver sa souveraineté monétaire ?

 

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